Greta Thunberg : un modèle défectueux entre science et politique du climat

Greta Thunberg : un modèle défectueux entre science et politique du climat

Par Alexandre Dion-Degodez

La prise en charge politique des problèmes liés aux changements climatiques propulse les recherches en écologie à l’échelle internationale. À travers une analyse du discours militant écologiste de Greta Thunberg, on constate que le modèle linéaire des rapports entre science et politique du climat est problématique et nécessite une révision.

Les négociations internationales du climat dominées par le modèle linéaire

La science des changements climatiques est la pierre angulaire des négociations internationales sur le climat. Le Groupe d’experte·]s intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) est un acteur incontournable du régime climatique1. Il mobilise les meilleur·e·s chercheurs et chercheuses chargé·e·s d’évaluer l’état des connaissances sur les changements climatiques et de transmettre cette évaluation à travers des rapports écrits. Le GIEC se compose de trois groupes de travail, qui ont pour mandat d’évaluer respectivement l’évolution du climat, ses impacts sur les sociétés et les stratégies d’adaptation et d’atténuation. Comme son nom l’indique, le Groupe d’expert·e·s est intergouvernemental, ce qui signifie qu’il est chapeauté par les différents gouvernements des États ayant ratifié la Convention-cadre sur les changements climatiques en 1992. En ce sens, les gouvernements choisissent les chercheur·e·s selon leurs propres critères d’expertise. Les rapports du GIEC sont également soumis à une révision hautement politisée lorsqu’il est temps de rédiger les « résumés pour décideurs ». Dans ces documents dirigés à l’attention des gouvernements, chaque ligne, mot et virgule sont négociés par les corps diplomatiques des États et la rédaction scientifique. Les « résumés pour décideurs [et décideuses] » impliquent une synthèse et une sélection du savoir scientifique et transforment les rapports complets et complexes du GIEC en des documents « lénifiants, sans arêtes, ni dramatisation2 ». Cette traduction du savoir scientifique a pour but d’établir un consensus politique sur la formulation du problème climatique.

Le processus décrit ci-dessus, où la science précède l’action politique, est communément décrit dans la littérature comme un « modèle linéaire ». On attribue à la science les connaissances, le savoir, les faits tandis que la politique est investie des décisions, des valeurs et des croyances. Ce modèle établit une frontière imaginaire entre science et politique3. Cette frontière est maintenue de manière conventionnelle pour éviter toute politisation de la science ou à l’inverse, toute scientifisation du politique. Les expert·e·s scientifiques acceptent et revendiquent même cette linéarité dans le but de préserver leur autonomie des pouvoirs politiques, des intérêts externes et des lobbies. Cette règle garantit en retour la crédibilité, la légitimité et l’autorité du travail scientifique en société. Une « bonne science » est donc celle qui respecte cette séparation entre valeurs et faits.

Le GIEC s’est toujours revendiqué de ce modèle linéaire. Son credo, « policy-relevant but not policy-prescriptive4 » illustre l’observation stricte de la séparation entre science et politique. Sa proximité avec les gouvernements et sa participation à l’élaboration des « résumés pour décideurs [et décideuses] », pour ne citer que ces exemples, rendent toutefois la rhétorique de « science-speaks-truth-to-power5 » problématique. Le mandat et l’activité du GIEC, malgré ces affirmations de « neutralité scientifique », sont beaucoup plus complexes et hybrides en pratique que laisse présager la théorie du modèle linéaire. La sociologie des sciences et techniques (Science and Technology Studies, STS) défend d’ailleurs depuis plus de vingt ans un modèle dit de « coproduction6 ». Penser les rapports entre science et politique dans le cadre dominant du modèle linéaire amène son lot de limites et de difficultés pour comprendre et appréhender les changements climatiques. En ce sens, la rhétorique de Greta Thunberg peut nous permettre de comprendre comment le modèle linéaire se maintient dans le discours militant écologiste.

La perspective linéaire du discours militant écologiste de Greta Thunberg

Greta Thunberg est une jeune étudiante originaire de Stockholm. Son militantisme écologique a officiellement débuté le 20 août 2018, devant le Parlement suédois. Ce qui devait être une grève scolaire pour le climat jusqu’aux élections législatives s’est rapidement transformée en une mobilisation d’envergure nationale et internationale. En l’espace de trois semaines, Greta Thunberg a mobilisé, avec l’aide d’autres militant·e·s de diverses organisations de défense du climat, des personnes de partout en Suède, mais aussi d’Allemagne, de Finlande, de Grande-Bretagne, des Pays-Bas et de Norvège. De quelques milliers en septembre 2018, Thunberg et le mouvement Fridays for Future ont rallié des millions de militant·e·s en l’espace d’un an. La jeune militante faisait d’ailleurs partie des nôtres à l’occasion de la marche mondiale pour le climat le 27 septembre 2019 qui est, soit dit en passant, la plus grande manifestation de l’histoire du Québec. Son implication pour lutter contre la crise climatique est non-négligeable. Au-delà des manifestations, Thunberg est fréquemment invitée à prononcer des discours sur le climat devant l’élite politique mondiale. Le Forum économique mondial, le Parlement européen et la Conférence des Nations Unies sur les changements climatiques sont quelques exemples des tribunes dont elle bénéficie. Greta Thunberg mérite considération, notamment parce qu’elle a su mobiliser un public imposant sur plusieurs continents, mais aussi parce qu’elle dispose de forums internationaux de premier plan.

Greta Thunberg a d’abord écrit Rejoignez-nous7, un manifeste qui appelle à l’action climatique. Ses discours prononcés en 2019 à l’occasion de grands rassemblements se retrouvent également dans son livre No One is Too Small To Make a Difference8. Ces idées sont aussi traduites dans un livre rédigé avec sa famille, particulièrement sa mère, Malena Ernman, intitulé Scènes du cœur9.

Pour l’adolescente, qui avait seize ans en 2019, l’enjeu est que la crise climatique représente « […] la principale question à laquelle l’humanité doit faire face et qu’elle est totalement ignorée depuis plus de trente ans10 ». Elle lance un message, comme l’exprime l’intitulé : « Une lettre à tous ceux [et celles] qui ont la possibilité d’entendre11 ». Ce message est simple et clair : « Nous voulons que vous vous investissiez pour de bon dans cette crise de durabilité aiguë qui fait rage autour de vous. Et nous voulons que vous commenciez à appeler les choses par leur nom.12 » Ce « nous » renvoie aux jeunes générations existantes, mais aussi aux générations futures. Celles qui naissent et grandissent avec les changements climatiques. Le « vous » s’adresse plutôt aux générations antérieures. Celles qui ont ignoré les premiers cris d’alarme sur les changements climatiques, il y a trente ans, en poursuivant leur « business as usual13 ». En opposant un « nous, les jeunes non-responsables » à un « vous, adultes irresponsables », Thunberg touche à un aspect crucial des changements climatiques, soit celui des responsabilités différenciées et intergénérationnelles de la crise. Il demeure qu’interpeller toute une génération au travers d’une déclaration reste plutôt vague et limité en termes de revendications politiques. Son intention se précise dans son manifeste.

Nous savons que les hommes et les femmes politiques ne veulent pas nous parler. Très bien, nous ne voulons pas leur parler non plus. À la place, nous voulons qu’ils parlent aux scientifiques, qu’ils les écoutent enfin. Parce que nous ne faisons que répéter ce qu’ils disent et redisent depuis des décennies. Nous voulons que vous respectiez l’Accord de Paris et les préconisations des rapports du GIEC. Nous n’avons aucun autre manifeste politique ou demande que celle-là : écoutez la science14!

Dans son manifeste, la militante écologiste invite les dirigeant·e·s politiques à écouter la science des changements climatiques. Les termes sont d’autant plus forts dans la version originale de son discours, prononcé devant le Comité économique et social européen : « Nous n’avons aucun autre manifeste politique ou demande que celui-là : unissez-vous derrière la science.15 » Thunberg réitère cet appel à l’unisson devant plusieurs tribunes, au point de faire de la science « le cœur de la politique et de la démocratie ».

Lorsque j’invite les politicien.ne.s à prendre part maintenant, ils me répondent généralement qu’ils ne peuvent changer les choses drastiquement, de crainte de perdre des votes aux prochaines élections. Je leur donne raison, évidemment, car la plupart des gens ne sont mêmes pas conscients que ces changements sont nécessaires. C’est pourquoi je leur répète de s’unir derrière la science. Il faut permettre à la science d’être au cœur de la politique et de la démocratie.16

Ces extraits montrent que pour Thunberg, le nœud du problème est politique et la solution réside dans la confiance accordée à la science. Les politicien·ne·s doivent cesser d’ignorer la crise actuelle et respecter les recommandations de la communauté scientifique. Thunberg agit comme messagère. Elle répète le message des scientifiques sur des tribunes auxquelles ils et elles n’ont pas nécessairement accès.

De plus, la méconnaissance générale de la crise climatique explique le statu quo politique. Cette idée se répète à plusieurs reprises dans Scènes du cœur, notamment lorsqu’elle justifie sa grève pour le climat : « La grève scolaire pour le climat va être complètement incompréhensible pour tous ceux [et toutes celles] qui ne perçoivent pas la gravité de la situation […]. Et puisque presque personne ne sait, presque personne ne comprendra. On va me détester comme pas permis!17 », ou encore « Si on n’a pas de connaissances solides en matière de crise climatique, je suis évidemment complètement incompréhensible et je sais bien que presque personne ne se doute de l’existence de cette crise.18 » L’absence d’actions politiques s’explique donc, selon elle, par la méconnaissance générale qu’a la société de la crise actuelle. 

Face à cette ignorance commune, la stratégie de la jeune militante suédoise consiste à vulgariser et à transmettre publiquement les connaissances scientifiques sur le climat dans l’objectif de rallier l’opinion publique à son mouvement et de faire ainsi pression sur la classe politique pour opérer des changements concrets. D’après la mobilisation qu’elle et son mouvement Fridays for Future ont entraînée, Thunberg a su inscrire le problème global des changements climatiques dans l’espace public, et ce, à une échelle internationale. C’est, d’ailleurs, ce qui lui a valu le titre de personnalité de l’année par le magazine Times19.

Cette analyse du discours écologiste de Greta Thunberg permet de cerner les causes, l’amplitude et les composantes qui ont mené à l’inscription de la crise climatique dans l’espace public. Elle permet aussi de soulever l’écart entre science et politique. Pour Thunberg, le déficit de connaissances doit être comblé de manière linéaire. La science doit motiver la politique à agir en réponse aux connaissances qu’elle lui fournit. Le modèle linéaire est explicite lorsqu’elle exprime : « C’est comme si les politiques devaient toujours être capables de répondre aux questions et ne jamais avoir le droit de dire qu’ils ne savent pas. Même quand ils n’y connaissent rien20. »

Les limites du modèle linéaire dans l’appréhension des changements climatiques

Le modèle linéaire, tel qu’il se retrouve dans la rhétorique de Greta Thunberg, s’oppose à plusieurs difficultés lorsqu’il est mis en pratique face aux réalités des changements climatiques. Dans le cadre de ce texte, je me limite à deux difficultés : le modèle linéaire est à la fois réducteur et déterministe, en plus de politiser la science et de dépolitiser la politique. Ces difficultés ont un impact certain sur l’appréhension des changements climatiques.

Dans ses premiers rapports, le GIEC définit les changements climatiques comme un excès de CO2 dans l’atmosphère. Cette définition cadre l’enjeu comme un problème environnemental global. Elle se fait toutefois taxer de « réductionnisme physico-chimique21 » et de « déterminisme environnemental22 » par des géographes des sciences. Par ces termes, celles et ceux-ci pointent du doigt la domination des sciences de la nature au sein du groupe d’expert·e·s, au détriment des sciences sociales. Les dimensions sociales, culturelles et économiques des changements climatiques sont effacées au profit d’une définition physique et chimique. Cette définition s’avère d’autant plus problématique lorsque performée par et dans le modèle linéaire.

La politologue Silke Beck montre, en 2010, qu’une définition strictement environnementale et globale du problème a longtemps marginalisé les thèmes de l’adaptation et des vulnérabilités au sein du GIEC et, conséquemment, à l’intérieur des négociations internationales23. Parce qu’il doit fournir l’état des connaissances aux politicien·ne·s, le Groupe d’expert·e·s a, dès son entrée en fonction, opté pour une approche explicative qui s’appuie sur des études présentant d’abord les faits capables d’être interprétés par les politiques (evidence-based policy). Cette approche linéaire a, comme corollaire, la division du GIEC en trois groupes de travail distincts : le groupe I présente l’évolution des gaz à effet de serre dans l’atmosphère, le groupe II mesure les impacts de cette évolution sur les populations et le groupe III établit les réponses possibles à ces impacts. La définition physique et chimique des changements climatiques du groupe I vient toutefois restreindre le mandat des groupes II et III.

Dans ses premiers rapports, le GIEC mise sur la réduction des émissions de gaz à effet de serre en réponse aux impacts des changements climatiques. L’adaptation et les vulnérabilités des populations sont relayées au second plan. Une politique qui prend en compte ces deux dimensions cherche à augmenter la résilience des populations les plus vulnérables aux impacts des changements climatiques. Cette politique est toutefois considérée en dernière mesure, notamment lorsque les États échouent à mettre en œuvre des politiques ambitieuses de réductions de gaz à effet de serre. La définition environnementale du groupe I, jointe au modèle linéaire d’expertise, a marginalisé cette dimension du problème, et ce, jusqu’à ce que les pays du Sud global, plus vulnérables aux impacts des changements climatiques, fassent pression pour obtenir une définition du problème qui tienne compte des questions de développement et d’équité Nord-Sud. Le GIEC a opéré une réorganisation majeure des groupes de travail à l’occasion de la publication du troisième rapport de synthèse24. Les impacts, l’adaptation et les vulnérabilités sont désormais traités au sein d’un seul et même groupe de travail, amorçant à la fois le traitement central de l’adaptation et le décloisonnement des changements climatiques de leur dimension strictement environnementale.

La politique, en s’appuyant de manière linéaire sur la science, s’expose à un traitement scientifique des changements climatiques. Le GIEC n’est pas immunisé face aux rapports de pouvoirs reliés à la production de savoirs scientifiques. L’issue du problème est directement influencée par la forme et le type de savoir mobilisés pour y faire face. Une solution à cette difficulté est d’ouvrir la production de connaissances à ces autres formes et types de savoirs. L’idée n’est pas de supprimer les sciences dites « dures » du climat (climatologie, physique, chimie, mathématique, etc.), mais bien d’ajouter des disciplines complémentaires (anthropologie, géographie, science politique, sociologie, etc.), voire de nuancer les connaissances existantes. Une telle intégration a le potentiel de redéfinir le problème des changements climatiques en évitant les angles morts, comme l’illustre la marginalisation de l’adaptation et des vulnérabilités dans les premiers rapports du GIEC. Une recherche interdisciplinaire permet de construire un dialogue entre disciplines qui fait ressurgir un type de savoir susceptible de mener à des solutions à la hauteur d’enjeux aussi complexes que les changements climatiques.

Une deuxième complication du modèle linéaire consiste à politiser la science et à dépolitiser la politique en créant des débats sur la science des changements climatiques. Le modèle linéaire suppose que plus de recherches scientifiques de meilleures qualités mèneraient nécessairement à un savoir plus fiable et crédible et permettraient au politique d’atteindre un consensus. Or, en matière de changements climatiques, cette promesse demeure inachevée.

Le politique, en basant ses décisions sur les recommandations scientifiques, induit le fardeau de la preuve sur les épaules des experts scientifiques. Les politicien·ne·s attendent des preuves scientifiques unanimes et certaines. Or, la sociologie des sciences a depuis longtemps montré que l’incertitude et les débats scientifiques font partie inhérente de la production de savoir scientifique25. À ce titre, le GIEC s’est longtemps attardé à construire une compréhension partagée de la détection et de l’attribution des changements climatiques reliés aux activités humaines. Même si ce stade semble atteint à l’échelle internationale, cette compréhension demeure matière à débat dans certains États. Aux États-Unis par exemple, l’industrie du pétrole forme l’un des lobbys les plus puissants du pays et finance certains instituts scientifiques dans le but de contredire d’autres positions scientifiques26. Le débat politique sur les changements climatiques devient, dans ce cas précis, un débat scientifique et épistémologique où différentes interprétations de la science s’affrontent. Plutôt que de conseiller le politique tel que promis par le modèle linéaire, la science se voit elle-même débattue par la politique.

Certain·e·s voient dans ces controverses une opportunité pour l’expertise de fabriquer des réponses scientifiquement inattaquables27. Le débat scientifique encourage, en ce sens, un travail toujours plus rigoureux afin de réduire les marges d’incertitudes. Ce travail va de pair avec une révision des attentes du politique vis-à-vis de la recherche scientifique. Le politique ne peut blâmer la science pour des situations auxquelles elle ne peut répondre. Sur un sujet aussi complexe que les changements climatiques, le politique doit apprendre à négocier avec l’incertitude, tout comme il compose déjà avec les certitudes.

En attendant cette révision des attentes du politique, la politisation des débats scientifiques met la science du climat sur la défensive28. Celle-ci se concentre alors à produire des preuves suffisamment convaincantes afin de répondre aux idéologies récalcitrantes, les sceptiques en matière de changements climatiques, par exemple. Ce scepticisme doit être nuancé. S’il semble opportun de développer et de maintenir en société un certain regard critique vis-à-vis de l’exercice de production de connaissances scientifiques, il en va autrement pour l’exercice d’un scepticisme idéologique et mal informé, induit par des lobbys qui ne cherchent qu’à détourner l’attention des enjeux communs. En effet, ce scepticisme rend inopérant le modèle linéaire. Le débat scientifique, chargé idéologiquement, se substitue au débat politique. La science ne peut alors remplir sa promesse de résoudre les controverses politiques et générer un consensus.

Ce problème s’est présenté assez tôt dans l’histoire du GIEC. Afin de répondre aux différentes interprétations et désaccords sur la science des changements climatiques, notamment ceux des pays en développement, les États à la Convention-cadre ont créé l’Intergovernmental Negotiating Comittee (INC, 1990), ainsi que l’Organe subsidiaire d’évaluation scientifique et technique (SBSTA, 1995). Ces organes intergouvernementaux, ralliant négociateurs, négociatrices et scientifiques, sont tous chargés de se saisir des questions politiques propres à la science des changements climatiques. C’est dans l’enceinte du SBSTA que s’est décidé, par exemple, l’enjeu méthodologique des inventaires nationaux d’émissions de gaz à effet de serre29. La création de ces organisations hybrides montre que science et politique peuvent apprendre et grandir conjointement au sein des controverses scientifiques dans l’arène climatique. Le risque pour la science de devenir un substitut au débat politique demeure néanmoins présent et problématique, non seulement parce qu’il vient politiser la science, mais aussi parce qu’il dépolitise la politique.

Vers un autre type de rapport à l’expertise scientifique

Malgré tout, ce serait tomber dans le piège du modèle linéaire que d’attribuer l’échec des négociations climatiques à cet écart entre la science et la politique du climat. S’il est raisonnable de dire que les expert·e·s scientifiques sont le pivot du régime climatique, il s’agit d’une utopie scientiste que de faire reposer entièrement sur leurs épaules la charge du débat politique. Certain·e·s sociologues des sciences font consensus : « L’impossibilité de s’en remettre entièrement aux sciences et techniques pour clore définitivement les débats est une caractéristique générale de notre époque, voire une constante à travers l’histoire30 ». Le débat sur les changements climatiques fait introduire d’autres hiérarchies, croyances et valeurs, qui dépassent largement la capacité des expert·e·s scientifiques, aussi compétent·e·s soient-elles et ils, à répondre aux demandes du politique.

Une science plus réflexive permettrait néanmoins de faire avancer les négociations sur le climat. Certains éléments d’un nouveau rapport à l’expertise scientifique ont été soulevés dans ce chapitre. La nécessité de créer un savoir interdisciplinaire qui permet de prendre en considération certains aspects occultés par les sciences dominantes du climat. Le besoin du politique de rectifier ses attentes envers les sciences du climat, notamment en rapport avec l’incertitude reliée à l’activité scientifique. Une autre piste de réflexion se situe dans la création « d’espaces dialectiques ouverts31 », où les expert·e·s scientifiques peuvent débattre et témoigner publiquement du comment et du pourquoi leurs connaissances privilégiées sont pertinentes au processus de décision politique. Plusieurs chercheuses en sciences sociales en appellent à une science « civique32 », qui répondrait davantage aux demandes sociétales et démocratiques. Car, s’il a été question majoritairement du rapport entre science et politique, il importe de préciser que toute solution démocratique aux changements climatiques passe par la volonté générale de la population, d’où l’importance de miser sur la communication de la recherche scientifique et sa vulgarisation, notamment au travers de revues influentes comme Nature et Science33. Paradoxalement, c’est ce que Greta Thunberg réalise en centrant l’attention médiatique sur l’enjeu climatique. Ce chapitre invite simplement à se méfier du piège du modèle linéaire qui, en promouvant un discours d’union des politiques derrière la science, tend plutôt à masquer les responsabilités du politique sous le spectre d’une science du climat surdéterminée.

Crédit photo : Kevin Snyman, Pixabay, https://pixabay.com/fr/photos/climatique-d-urgence-4193110/

1 Le régime climatique repose sur un « système complexe d’arènes et d’institutions qui réunit des acteurs et des partenaires de plus en plus nombreux (scientifiques, ONG, think tanks, acteurs du monde des affaires, etc.), mobilise des instruments (comptabilité carbone, indicateurs de réchauffement, mécanismes de développement propre) et voit s’affronter des intérêts économiques et des enjeux politiques variés. […] [I]l ne se réduit pas au régime juridique des relations internationales, mais établit des relations spécifiques nouvelles entre sciences, politique et marché. » Cité dans Stefan C. Aykut et Amy Dahan, Gouverner le climat ? : 20 ans de négociations internationales, Paris : Presses de Sciences Po, 2015, p. 17.

2 Ibid., p. 77.

3 Par politique, j’entends à la fois la et le politique dans le sens où le politique renvoie au lieu où se déroule l’activité politique, c’est-à-dire l’État et ses institutions. La politique s’inscrit, quant à elle, dans une « démarche raisonnée où l’action est pensée en vue d’un projet politique, d’une transformation de l’ordre institué ou de son maintien. » (Deslandes et al., 2012, p. 13) Le politique demeure toutefois sujet à changement selon la politique. Le politique est à repenser selon les savoirs, les expériences et les relations étudiées. C’est pourquoi il décrit également les institutions internationales ou encore les comités de citoyens. La/le politique s’inscrivent dans un rapport dynamique de définition. Charles Deslandes, Guide de méthodologie en science politique : normes méthodologiques et stratégies de recherche destinées aux étudiants et étudiantes de premier cycle, 4e éd., Montréal: Centre Paulo-Freire, 2012, p. 13.

4 Robert T. Watson, « Turning Science into Policy : Challenges and Experiences from the Science Policy Interface », Philosophical Transactions of the Royal Society B: Biological Sciences, 360(1454), 2005, 471-477. doi.org/10.1098/rstb.2004.1601

5 David Collingridge et Colin Reeve, Science Speaks to Power, New York : St Martin’s Press.

6 Sheila Jasanoff et Brian Wynne, « Science and Decisionmaking »,. dans Human Choice and Climate Change (p.1-87), Batelle Press : Colombus, 1998 ; Sheila Jasanoff, States of Knowledge: The co-production of science and social order, London ; New York : Routledge, 2004 ; Stefan C. Aykut et Amy Dahan, op. cit.

7 Greta Thunberg, Rejoignez-nous: #grevepourleclimat, Paris : Kero, 2019.

8 Greta Thunberg, No One is Too Small To Make a Difference, London : Penguin Random House, 2019.

9 Greta Thunberg et coll., Scènes du cœur, Paris : Kero, 2019.

10 Ibid., p. 303.

11 Ibid., p. 120.

12 Ibid., p. 121.

13 Ibid., p. 133.

14 Greta Thunberg, Rejoignez-nous: #grevepourleclimatop. cit., p. 20.

15 Dans le texte original: We don’t have any other manifestos or demands – you unite behind the science, that is our demand. ; Greta Thunberg, Penguin Random House, op. cit., p. 35.

16 Dans le texte original: When I tell politicians to act now, the most common answer is that they can’t do anything drastic because it would be too unpopular among the voters. And they are right, of course, since most people are not even aware of why those changes are required. That is why I keep telling you to unite behind the science. Make the best available science the heart of politics and democracy. ; Ibid., p. 51-52.

17 Greta Thunberg, Scènes du cœurop. cit., p. 282.

18 Ibid., p.298-299

19 Charlotte Alter, Suyin Haynes et Justin Worland, « 2019: Person of the Year », Time Magazine, 11 décembre 2019. www.time.com/person-of-the-year-2019-greta-thunberg.

20 Greta Thunberg, Scènes du cœurop. cit., p. 310.

21 David Demeritt, « The Construction of Global Warming and the Politics of Science », Annals of the Association of American Geographers, 91(2), 307‑337. doi.org/10.1111/0004-5608.00245

22 Mike Hulme, Why We Disagree About Climate Change: Understanding Controversy, Inaction and Opportunity. Cambridge : Cambridge University Press, 2009.

23 Silke Beck, « Moving beyond the Linear Model of Expertise? IPCC and the Test of Adaptation », Regional Environmental Change, 11(2), 2011, 297‑306. doi.org/10.1007/s10113-010-0136-2.

24 James J. McCarthy, Osvaldo F. Canziani, Neil A. David, J. Dokken et Kasey S. White, Climate Change 2001 : Impacts, Adaptation, and Vulnerability, Contribution of Working Group II to the Third Assessment Reportof the Intergovernmental Panel on Climate Change, Intergovernmental Panel on Climate Change, 2001.

25 Thomas S. Kuhn, La structure des révolutions scientifiques, Montréal: Flammarion: 2018 [1962].

26 Naomi Oreskes et Erik Conway, Merchants of Doubt: How a Handful of Scientists Obscured The Truth On Issues from Tobacco Smoke to Global Warming, New York. Bloomsbury Press, 2010.

27 Sandrine Bony, « Comment le débat scientifique fait progresser l’expertise sur les rétroactions atmosphériques », dans Hervé Le Treut, Jean-Pascal Van Ypersele, Stéphane Hallegatte et Jean-Charles Hourcade (dir.), Science du changement climatique : Acquis et Controverses (p. 37-38), Paris : Iddri, 2004, 104 p.

28 Silke Beck, op. cit.

29 Stefan C. Aykut et Amy Dahan, op. cit., p. 82.

30 Ulrich Beck, La société du risque. Sur la voie d’une autre modernité, Paris : Aubier : 2001 ; Bruno Latour, Nous n’avons jamais été modernes. Essai d’anthropologie symétrique, Paris : La Découverte : 1991. Cité dans Stefan C. Aykut et Amy Dahan, op. cit., p. 428.

31 Philippe Roqueplo, Climats sous surveillance : limites et conditions de l’expertise scientifique, Paris : Economica, 1993.

32 Karin Bäckstrand, « Civic Science for Sustainability: Reframing the Role of Experts, Policy-Makers and Citizens in Environmental Governance », Global Environmental Politics, 3(4), 2003, 24‑41 ; Amanda Machin, Negotiating Climate Change: Radical Democracy and the Illusion of Consensus, New York : Zed Books, 2013 ; Isabelle Stengers, Une autre science est possible!. Manifeste pour un ralentissement des sciences, Paris : Empêcheurs de penser en rond, 2013.

33 Lutz Bornmann, Robin Haunschild, et Werner Marx, « Policy documents as sources for measuring societal impact: how often is climate change research mentioned in policy-related documents? », Scientometrics, 109(3), 2016, 1477‑1495.

Exclusions des femmes et des minorités invisibles dans le champ politique québécois

Exclusions des femmes et des minorités invisibles dans le champ politique québécois

Bien que le Québec soit l’une des sociétés dans le monde où les luttes féministes aient mené aux plus grandes avancées sur les questions d’égalité entre les femmes et les hommes, la parité n’est pas toujours atteinte au niveau politique. Le Conseil du statut de la femme1 explique ce constat par la socialisation qui diffère dès le plus jeune âge filles et garçons, par le partage inégal du travail domestique et familial, par le manque de ressources financières des femmes ou encore par la culture des partis et des institutions politiques qui, comme nous le verrons, ne mettent pas toujours en place les mesures nécessaires pour augmenter le nombre de femmes dans leurs rangs.

Clés historiques et quantitatives

Nous sommes le 25 avril 1940 au Québec et les femmes obtiennent enfin le droit de vote, mais aussi le droit de se porter candidates aux élections. Sept années plus tard, une première femme se présente lors d’une élection partielle, mais ne sera pas élue et il faudra attendre le 14 décembre 1961 pour que l’Assemblée nationale accueille sa première députée. Il s’agit de Claire Kirkland-Casgrain2 qui sera élue sous la bannière du Parti libéral du Québec et à qui on doit notamment la loi 16 qui permit de mettre fin à l’incapacité juridique des femmes mariées. Pendant plus de 12 ans, elle sera la seule femme à siéger comme députée à Québec, entourée par une centaine de collègues masculins.

Selon Élections Québec, qui a réalisé un rapport sur les femmes en politique3, alors que les Québécoises ont obtenu leur droit de vote et de candidature plus tard que celles des autres provinces canadiennes, elles étaient en 2012 en bonne position quant à leur représentation parlementaire avec un taux de 32,8 % de femmes. Pourtant, seulement deux ans plus tard, la situation change et le Québec compte seulement 27,2 % d’élues. Un phénomène qui prouve qu’en matière de luttes pour les causes des femmes, rien n’est jamais acquis. Du côté des Conseils des ministres, les données officielles de l’Assemblée nationale révèlent que la représentation des élues oscille entre 30 % et 34 % depuis les années 2000, à l’exception de la période 2007-2008 sous le gouvernement Charest qui correspond à une parité avec 50 % d’élues, si l’on exclut le premier ministre. L’ensemble de ces chiffres se situe donc loin de l’idéal de parité, et on parle alors d’une sous-représentation persistante des femmes en politique. Cette sous-représentation se manifeste également au niveau de la politique municipale. Selon un rapport du Conseil du statut de la femme datant de 2015, les femmes représentent seulement 17,3 % des mairesses4 du Québec. Mais il est tout de même souligné que dans les villes dont la population est de 100 000 personnes et plus, on trouve la plus forte proportion d’élues, avec une moyenne de 35 %. Plus encore, parmi les 10 plus grandes villes au Québec, quatre ont atteint la zone paritaire, soit Montréal, Québec, Sherbrooke et Longueuil. Un fossé entre petites et grandes municipalités qui s’expliquerait par « la diversité des enjeux, la proximité et les salaires plus élevés des élus des grandes villes » qui permettraient aux femmes de se consacrer à temps plein à leurs obligations politiques tout en restant près de leur famille5.

Un autre phénomène qu’il convient de souligner est que depuis ces deux dernières décennies, la proportion de femmes occupant un siège de ministre est supérieure à celle des députées au sein de l’Assemblée nationale, ainsi qu’en rendent compte les tableaux suivants. Ce constat coïncide avec les résultats de Magali Paquin, agente de recherche à l’Assemblée nationale6.

Tableau 1 : Conseil exécutif
Année de formation du cabinetCabinetNombre de ministres excluant le premier ministreNombre de femmes ministresPourcentage7
2001Landry23730,43
2003Charest24833,33
2007Charest18950
2008Charest261350
2012Marois23834,78
2014Couillard26830,77

Source : Site de l’Assemblée nationale du Québec8

Tableau 2 : Assemblée nationale
DatesSiègesÉluesPourcentage
20031253830,4
20071253225,6
20081253729,6
20121254132,8
20141253427,2

Source : Site de l’Assemblée nationale du Québec9

Quelques facteurs et concepts explicatifs

Appuyée d’une littérature éclairante sur le sujet, Magali Paquin, sans expliquer directement ce phénomène, dresse une liste non exhaustive de facteurs qui influencent l’accès des femmes aux postes exécutifs : il s’agit des conditions socioéconomiques, de la culture politique ou organisationnelle, de l’influence des groupes de pression ou de la communauté internationale, du système électoral et partisan, de l’intensité de la compétition partisane, du cycle électoral, des positions idéologiques des partis et du caractère généraliste ou spécialisé du Cabinet. La sous-représentation politique des femmes peut également s’expliquer par le fait qu’elles soient susceptibles d’être des « agneaux sacrificiels » (sacrificial lambs) selon l’expression utilisé dans la littérature scientifique, c’est-à-dire qu’elles sont davantage nominées dans des circonscriptions dans lesquelles elles sont susceptibles de perdre10. Des spécialistes du sujet comme Melanee Thomas et Marc Bodet ont utilisé des données sur les élections fédérales canadiennes entre 2004 et 2011 qui ont validé cette théorie. Plus encore, leurs recherches indiquent aussi que les places au sein des gouvernements ne sont pas aussi sécurisées pour les femmes que pour les hommes, et que ces deux facteurs expliquent, du moins partiellement, pourquoi les femmes sont sous-représentées dans la sphère politique.

Pourtant, quand on creuse davantage, les données semblent plus nuancées au Québec. Selon Manon Tremblay qui a analysé les élections québécoises entre 1976 et 2003, les candidates féminines n’auraient pas spécifiquement eu moins accès aux forteresses politiques de leur parti que les hommes au Québec. L’autrice ajoute même que, selon ses résultats, « le mode de scrutin majoritaire et uninominal ne peut être décrété comme étant systématiquement hostile aux femmes »11 :  

« […] les femmes qui aspiraient à décrocher un premier mandat de représentation parlementaire ont été candidates dans des circonscriptions compétitives, c’est-à-dire qui, d’un point de vue statistique, offraient le même potentiel de victoire que celles où les hommes se présentaient. Un sous-groupe de candidates fait toutefois exception à cette observation générale, soit les héritières dont le tiers s’est vu léguer des circonscriptions de moindre compétitivité au chapitre de la marge de victoire à l’élection précédente et de la performance passée de leur parti dans les comtés où elles se présentèrent ainsi que du potentiel de victoire défini par l’alternance PLQ/PQ au niveau national.12 »

Dans le même ordre d’idée, selon une analyse réalisée par Radio-Canada, les femmes ont désormais autant de chances d’être élues que les hommes au Québec, et même plus de chances de devenir ministres13. À l’aide d’une compilation de résultats électoraux de l’ensemble des élections générales et partielles depuis le 25 avril 1940, Radio-Canada remonte le fil des élections et non-élections féminines pour relever que « c’est finalement à partir des années 90 que les hommes et les femmes ont les mêmes chances d’être élu[·e]s, soit 1 sur 6. Il n’y a plus d’écart entre les deux sexes »14. Cette affirmation semble surprenante à la vue des chiffres et des études précédemment évoquées, mais leur recherche précise tout de même qu’il y plus d’hommes qui deviennent ministres que de femmes. Plus encore, selon l’analyse d’Allison Harell qui commente cette étude, les femmes accèdent au statut de premières ministres au Canada à des moments spécifiques de l’histoire des partis, c’est-à-dire « quand ils sont en difficulté ou en déclin. L’argument, c’est qu’on cherche une femme pour prendre soin de l’organisation, pour reprendre un langage très genré »15. Harell relève également le fait que les femmes considèrent la politique « comme un environnement hostile », notamment par rapport à la question de la médiatisation et du harcèlement en ligne16.

D’ailleurs, en période d’élections, la question de la couverture médiatique ne peut être mise de côté. Selon les chercheuses du projet Plus de femmes en politique? Les médias et les instances municipales, des acteurs clés!17les politiciennes sont largement sous-représentées dans les médias. Grâce à l’analyse de 1100 articles issus de la presse écrite et de médias communautaires écrits francophones du Québec pendant la campagne électorale municipale entre le 22 septembre et le 6 novembre 2017, les chercheuses ont pu relever que seulement 29 % de la médiatisation a été accordée aux femmes candidates contre 71 % pour les hommes. Plus encore :

« L’appartenance ethnoculturelle, comme le montre Erin Tolley (2016), est un autre marqueur identitaire qui exerce une influence sur le cadrage médiatique associé aux politiciennes. À travers une analyse de la représentation des femmes politiques s’identifiant comme des minorités visibles, Tolley expose la tendance des médias écrits à présenter d’abord l’appartenance ethnoculturelle ou de genre de ces femmes, avant de les introduire comme des actrices politiques18. »

Système politique de l’entre soi

En ce qui concerne spécifiquement le système politique québécois, il faut également prendre en compte le fait que le choix des membres du cabinet revient souvent à la personne élue à la tête du gouvernement, soit le premier ministre. Ainsi, il est avancé par Paquin que « sa décision est teintée de sa personnalité, de ses affinités, de ses préférences personnelles, des objectifs politiques qu’elle s’est fixée et de l’image qu’elle souhaite projeter »19. Cela peut alors impliquer un certain degré de jugement non seulement sur la compétence des femmes, surtout en ce qui concerne les portefeuilles ministériels les plus importants, mais aussi des personnes issues des minorités visibles ou Autochtones20. En effet, tel que souligné par Malinda Smith, qui étudie le cas des universitaires, il subsiste un mythe tenace qui suppose que la diversité implique moins d’excellence ou de mérite21.

Cela se confirme au Québec par un rapide exercice de sociologie visuelle qui nous permet d’émettre un constat : le nombre de femmes n’augmente pas, mais plus encore, les minorités sont invisibles. En effet, en parcourant les photos de groupe des Conseils des ministres de ces deux dernières décennies, le constat est clair : les Conseils des ministres sont très majoritairement masculins et blancs. Et alors que les flux de migration sont « sous le contrôle serré de l’État […], les principaux lieux de prise de décision demeurent encore inaccessibles aux personnes issues de ce flux, même après plusieurs générations »22. Ainsi, l’exercice professionnel de la politique semble encore réservé à une élite sociale, blanche et masculine. Ce constat renvoie au concept de la fabrique de l’entre-soi, qui se définit comme une « production renouvelée d’un ordre du genre toujours fondé sur la différenciation des catégories de sexe qui empêche les entrantes de construire une identité gouvernante et de subvertir les logiques de fonctionnement du champ politique »23.

Les données abordées précédemment illustrent une sous-représentation des femmes qui est également conceptualisée par la littérature avec la notion de plafond de verre (glass ceiling). Ce concept désigne l’inaccessibilité pour certaines catégories de personnes à certains niveaux hiérarchiques. Plus précisément, il s’agit d’une « barrière invisible qui empêche les femmes d’accéder aux hautes sphères du pouvoir, des honneurs et des rémunérations »24. Dans cette définition, il s’agit spécifiquement des femmes, mais ce concept concerne également les Autochtones, les minorités visibles25, les personnes vivant une situation de handicap ou encore les personnes issues de la communauté LGBTQIA +. Mais précisons tout de même que les femmes ne sont pas un groupe minoritaire dans la société car elles en constituent la moitié.

D’autres autrices comme Farida Jalalzai ont analysé la question du plafond de verre dans un contexte politique. Dans son texte Women Rule: Shattering the Executive Glass Ceiling, l’autrice examine l’ensemble des cas des femmes présidentes et des premières ministres entre les années 1960 et 2007 afin d’explorer les liens genrés entre postes de pouvoir et autorité, entre pouvoir et indépendance. Alors qu’aux États-Unis en 2008 (et plus tard en 2016) une femme nommée Hillary Clinton est plus proche qu’aucune autre femme avant elle d’accéder à la présidence étasunienne, d’autres ailleurs ont déjà brisé le plafond de verre au Libéria, en Allemagne et au Chili26. Pour l’autrice, les facteurs institutionnels sont centraux pour comprendre la représentativité et l’accession des femmes au pouvoir. Les différences entre le poste de président ou de premier ministre ferait en sorte que les femmes ont plus de chance d’être élues lorsqu’elles se présentent pour le second, car « une Première ministre qui partage le pouvoir avec un parti est plus souvent vue comme tolérable »27.

Les idéologies genrées sont alors également à prendre en compte.

Pourquoi vouloir plus de femmes en politique?

Le constat est clair : là où est le pouvoir, les femmes, les minorités visibles et les Autochtones sont sous représenté·es, et la sphère politique se garde bien de montrer l’exemple. Pourtant, des décisions sont prises par le gouvernement en place pour l’ensemble de la population. Ainsi, il semblerait juste que celui-ci soit représentatif du groupe qu’il représente, qu’il s’agisse des questions de sexe et de genre, de l’origine ethnique et de la classe sociale. Il faut également souligner le fait que les femmes ne sont pas un groupe homogène et elles se distinguent à de nombreux égards. Pourtant, certaines politiques publiques touchent l’ensemble d’entre elles (par exemple : l’avortement, l’accès à la contraception, etc), et touchent également directement ou indirectement les hommes. Alors, est-ce que les intérêts des femmes sont mieux représentés quand plusieurs d’entre elles occupent des postes ministériels clés? L’histoire nous montre qu’il est déjà arrivé à des femmes membres de partis politiques différents de s’allier afin de faire voter des lois qui vont dans le sens des revendications des mouvements féministes. Dans un de ses rapports, le Conseil du statut de la femme souligne comme exemple à ce phénomène la Loi sur le patrimoine familial (1989), la Loi sur la perception automatique des pensions alimentaires (1995) et la Loi sur l’équité salariale (1996)28.

Ensuite, alors que l’on parle de sous-représentation, il est aussi question des différents types de représentation. Il y a d’abord la représentation descriptive qui prend en compte les caractéristiques des individus élus et non leurs actes. Ainsi, lorsque l’on parle de parité à 50 %, c’est parce qu’il s’agit du pourcentage moyen de femmes dans la population. Ici intervient alors un argument d’égalité et de justice. Puisque la population québécoise est bien composée à moitié de femmes, il serait juste que celles-ci soient équitablement présentes dans les instances de pouvoir. Ensuite, il y a la représentation substantive des femmes qui réfère « aux opinions exprimées et aux actions posées par les législatrices afin de changer et d’améliorer les expériences collectives des femmes »29. Et qui dit amélioration collective pour les femmes, dit amélioration pour la société québécoise dans son ensemble. Enfin, la représentation symbolique correspond à l’impact que peut avoir une certaine catégorie de personnes élues sur la population. Par exemple, l’hypothèse selon laquelle la présence des femmes dans la sphère politique pourrait encourager d’autres femmes à présenter leur candidature, à s’impliquer politiquement, peut être émise, idem pour les minorités visibles et les Autochtones. 

Alors, à la question « pourquoi plus de femmes en politique? » une réponse simple pourrait être énoncée : pour plus d’équité et de justice sociale. Et il en est de même pour les minorités visibles et les Autochtones. En effet, sans vouloir tomber dans le jeu du débat sur le multiculturalisme qui fait encore rage dans les colonnes de certains journaux, et qui est toujours d’actualité au Québec, les statistiques réalisées au Canada prouvent que le Québec est une société plurielle avec 12,96 % de minorités visibles dans l’ensemble du Québec et 34,18 % à Montréal30. D’ailleurs, les critiques vives et les réactions parfois même racistes suite à la candidature d’Ève Torres, qui aurait été la première femme voilée à se présenter aux élections provinciales si elle l’emportait dans la nouvelle circonscription de Mont-Royal-Outremont, cristallisent le malaise d’une partie de la population québécoise sur la question intersectionnelle entre genre et diversité.

Quelques pistes de solutions ?

À l’exemple de nombreux États dans le monde, des mesures incitatives ont été mises en place au Québec, au niveau gouvernemental, partisan et sociétal. Parmi celles-ci, nous pouvons citer les tentatives de réformes, d’abord en octobre 2002, avec une proposition de la Commission des institutions pour un mode de scrutin proportionnel qui pourrait être le moyen d’avoir davantage de femmes à l’Assemblée nationale31. Également, le Comité directeur sur la réforme des institutions démocratiques qui, lors d’une première tentative de réforme du mode de scrutin dans les années 2000, a publié un rapport contenant plusieurs recommandations pour améliorer la représentation des femmes en politique. On suggère par exemple la création d’un fond privé pour soutenir les femmes dans leur entrée en politique, la mise en place d’un système de remboursement bonifié des dépenses électorales pour un parti qui, suite à une élection générale, compte au moins 30 % de femmes dans sa députation, jusqu’à atteindre 50 % de représentation féminine, et la reconduction du programme « À égalité pour décider » avec l’augmentation de ses ressources financières32. Il s’agit d’une liste non exhaustive de propositions et de tentatives de réformes, et jusqu’à maintenant, seule la prolongation du programme « À égalité pour décider » semble avoir franchi le filet33.

Du côté des partis politiques, des comités de femmes ont été créés afin de favoriser la présence féminine dans les partis. Le Parti libéral du Québec, par exemple, a eu, entre 1950 et 1971, une structure nommée la « Fédération des femmes libérales du Québec », avant que celle-ci vote pour être intégrée à la structure du parti contre 50 % des votes au congrès plénier annuel, et 20 % du vote dans les autres instances du parti34. De son côté, le Parti québécois a eu un comité d’action politique des femmes jusqu’en 2011, et une représentation minimale des femmes est garantie au conseil exécutif du parti par 4 postes de conseillères sur les 8 postes de conseillères et conseillers. Enfin, Québec solidaire assure la parité dans ses instances et tous les organes nationaux du parti doivent être composés de femmes et d’hommes à part égale, idem pour les comités de coordination locale, pour les élections générales, ainsi que pour les porte-paroles qui doivent en tout temps être un homme et une femme.

Au niveau de la société, un des organismes principaux qui travaille sur la représentation des femmes en politique est le Groupe Femmes, Politique et Démocratie (GFPD), dont la mission est notamment l’éducation à la population et à l’action citoyenne et démocratique, ainsi que la promotion d’une plus grande participation des femmes à la vie politique35. Il faut souligner l’existence d’un Secrétariat à la condition féminine, dont le plus récent plan d’action met l’accent sur une plus grande participation des femmes aux instances officielles. De son côté, le Conseil du statut de la femme produit des mémoires sur les questions qui sont déposées en commissions parlementaires, mémoires qui demandent des mesures concrètes pour la représentation des femmes en politique.

La France est le premier pays à avoir mis en place une loi parité, la loi du 6 juin 2000, mais elle ne semble pas être la panacée pour plus d’égalité dans la sphère politique. Tout d’abord, selon l’analyse de Mariette Sineau, l’avènement de la Cinquième République en France en 1958 représente pour les femmes « la fin des grandes espérances politiques et le début d’une longue traversée du désert »36. Elle soulève que les femmes vont être pénalisées par le scrutin uninominal, « un système qui personnalise l’élection et favorise les notables en place »37. Cela se vérifie notamment par le fait que, durant les vingt premières années (1958-1978) de la Cinquième République, les femmes sont une minorité d’environ 2 % à siéger à l’Assemblée nationale38. Et même l’élection d’un parti de gauche socialiste en 1981, après vingt-trois ans de gouvernements de droite, n’inverse pas la tendance et l’Assemblée nationale est toujours à très grande majorité composée d’hommes39. La loi du 6 juin 2000 surnommée « loi sur la parité », bien que ce mot n’y figure pas officiellement, entraîne dans son sillon une augmentation de la proportion totale de candidates qui passe de 23,2 % en 1997 à 39,3 % en 2002, et pourtant, la parité est loin d’être atteinte40. Au niveau des élections législatives, cette loi n’a rien de contraignant, car seulement incitative, et les partis qui ne présentent pas 50 % de candidates se voient alors imputer une retenue financière41. À ce propos, l’autrice souligne que :

« […] dans un mode de scrutin qui privilégie les notables, les grands partis ont préféré payer des amendes, même lourdes, plutôt que féminiser leurs investitures, surtout les « bonnes ». Au terme d’un calcul non dénué de cynisme, ils ont parié que le nombre d’élus obtenu (à partir desquels est calculée la seconde fraction de l’aide publique) rapporterait davantage que ce que coûteraient les pénalités financières pour non-respect de la parité des candidatures42. »

Parce que nous sommes en 2018!

Dans le cadre de l’élection provinciale de 2018, Le Devoir43 avait mis en place une vigie parité afin de vérifier en un coup d’œil le taux de candidatures féminines dans chaque parti. Voici les pourcentages finaux pour un total de 47,2 % de candidates par ordre croissant44 : le Parti québécois avait 40,80 % de candidatures féminines, le Parti libéral du Québec avait 44 % de candidatures féminines, la Coalition avenir Québec avait 52 % de candidatures féminines, une première quand on sait que le parti ne comptait que 23 % de candidates en 2014, et arrivait donc à égalité avec Québec Solidaire qui comptabilise également 52 % de candidatures féminines et une candidature non-genrée45.

Lors de cette élection, 52 femmes ont été élues, ce qui constitue un record dans l’histoire politique québécoise, représentant ainsi 41,6 % des députés avec 28 d’entre elles (pour 74 député·es) sous le drapeau de Coalition avenir Québec, 16 pour le Parti libéral (pour 31 député·es), 5 pour Québec solidaire (pour 10 député·es) et 4 pour le Parti québécois (pour 10 député·es). Un contraste notable quand on sait qu’elles étaient seulement 34 femmes élues à l’Assemblée nationale en 2014. De plus, François Legault avait fait une promesse : s’il était élu, son cabinet serait paritaire. Le 18 octobre 2018, cette promesse est tenue avec un conseil de 26 ministres composé de 13 femmes et de 13 hommes. À noter que c’est une femme, Geneviève Guilbeault, qui est choisie en tant que vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique, qui est un portefeuille très important. Le trio économique lui, par contre, est exclusivement masculin.

Bien qu’on soit encore loin d’une représentation fidèle de la société québécoise, ce nouveau gouvernement compte davantage de personnes élues issues de la diversité. Une progression qui est, selon un article du Devoir, dû à « un plus grand nombre de candidat[·e]s de toutes origines dans le bassin des 500 candidat[·e]s présenté[·e]s par les quatre principaux partis »46 avec davantage de minorités visibles que par le passé pour la Coalition avenir Québec. L’autre avancée relevée par Le Devoir est la présence de candidat·es de la diversité dans des circonscriptions en région, ce qui est une nouveauté, notamment les deux candidat·es caquistes Olive Kamanyana, dans Pontiac, et Mathieu Quenum, dans Matane-Matapédia. En contraste, moins de 24 heures après l’annonce de la composition de son cabinet, François Legault s’est emparé du « dossier de la laïcité », s’attirant ainsi les foudres de l’élu montréalais Jim Beis, qui s’oppose au projet d’interdiction des signes religieux dans la fonction publique du nouveau gouvernement47. Il est également à relever que les Autochtones sont absent·es du gouvernement.

Conclusion

Cette dernière élection provinciale semble représenter un avancement, davantage sur la question de la parité que de la diversité en politique. Malgré tout, il est indispensable de rester alerte et de garder l’œil ouvert lors d’éventuels remaniements ministériels, lors des prochaines élections, mais aussi et surtout sur les projets politiques du nouveau gouvernement caquiste majoritaire. Concernant la parité, l’exemple de la France illustre que la mise en place de quotas, bien qu’accompagnée de mesures financières punitives, ne peut être suffisante. Du côté québécois, les efforts sont visibles, mais intègrent davantage les femmes blanches que toute autre catégorie dans ses plus hautes sphères décisionnelles. Et bien que les formulaires de recensement et d’autodéclaration fassent partie de la politique statistique canadienne et québécoise, il n’existe pas de données sur la diversité dans la fonction publique et sur les élu·es. À travers les différents points de cet article, nous avons traversé une partie de l’histoire politique québécoise et un fait semble à retenir : la cause paritaire avance certes depuis les années 1990, mais elle avance encore trop difficilement, et les reculs ne sont pas impossibles, tel qu’illustré par les données quantitatives sur le sujet depuis les deux dernières décennies. Le travail semble alors immense tant il s’agit de changer toute une culture politique qui est bâtie par et pour le masculin, depuis des siècles. Bien heureusement, les mobilisations et les luttes féministes continuent… pour un Québec plus juste et équitable. 

CRÉDIT PHOTO: Ozinoh -FLICKR

1 Julie Champagne et Audrée-Anne Lacasse, septembre 2015, La parité en politique, c’est pour quand?, Conseil du statut de la femme, Gouvernement du Québec. www.csf.gouv.qc.ca/speciale/femmes-en-politique/

2 Josiane Lavallée, 27 mars 2015, « Claire Kirkland-Casgrain », Encyclopédie canadienne. www.encyclopediecanadienne.ca/fr/article/claire-kirkland-casgrain/

3 Rosalie Readman, 2014, Femmes et politique : facteurs d’influence, mesures incitatives et exposé de la situation québécoise, Directeur général des élections du Québec, Collection Études Électorales, Gouvernement du Québec. www.electionsquebec.qc.ca/documents/pdf/DGE-6350.12.pdf

4 Andrée-Anne Lacasse, Sarah Jacob-Wagner et Félicité Godbout, 2015, Les femmes en politique : en route vers la parité, Conseil du statut de la femme, Gouvernement du Québec. www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/avis_femmes_et_politique_web2.pdf

5 Ibid.

6 Magali Paquin, 2010, « Le profil sociodémographique des ministres québécois : une analyse comparée entre les sexes », Recherches féministes, vol.23, no.1, pp.123-141. dx.doi.org/10.7202/044425ar

7 Cette section a été ajoutée au tableau original afin de clarifier la comparaison avec le tableau suivant.

8 Les remaniements ministériels survenus entre les élections générales ne sont pas indiqués. Voir le Site officiel de l’Assemblée nationale : www.assnat.qc.ca/fr/patrimoine/ministrescabinets.html

9 Les changements de députation pendant la législature sont précisés sur le Site officiel de l’Assemblée nationale : www.assnat.qc.ca/fr/patrimoine/femmes1.html

10 Melanee Thomas, Marc-André Bodet, 2013, « Sacrificial lambs, women candidates, and district competitiveness in Canada », Electoral Studies, vol.32, no.1, p.163. doi.org/10.1016/j.electstud.2012.12.001

11 Manon Tremblay, 2008, « Des femmes candidates dans des circonscriptions compétitives : l’exemple du Québec », Swiss Political Science Review, vol. 4 no.4, pp.691–714. doi.org/10.1002/j.1662-6370.2008.tb00117.x

12 Ibid, pp.706-707.

13 Naël Shiab, 22 août 2018, « Voici pourquoi plus de femmes devraient se lancer en politique », Radio-Canada. ici.radio-canada.ca/special/2018/elections-quebec/candidatures-femmes-hommes-chances-elues-ministre-politique/index.html

14 Ibid.

15 Ibid.

16 Ibid.

17 Caterine Bourassa-Dansereau, Laurence Morin, Marianne Théberge-Guyon et Table de concertation des groupes de femmes de la Montérégie, 2018, « Les représentations médiatiques des femmes aux élections municipales », Plus de femmes en politique ? Les médias et les instances municipales, des acteurs clés!, Service aux collectivités de l’Université du Québec à Montréal et Table de concertation des groupes de femmes de la Montérégie, Montréal et Longueuil. tcgfm.qc.ca/download/Representations-Mediatiques-Femmes-Elections-Municipales-Rapport

18 Ibid, p.20.

19 Magali Paquin, op. cit.

20 L’article se concentre sur la question du genre mais il semble impossible d’occulter la question de la race (comme construit social), qui est tout aussi primordiale, bien qu’il soit question d’enjeux complexes qui mériteraient bien plus que de partielles citations dans un article. De plus, la binarité femmes-hommes est omniprésente dans la littérature scientifique sur la parité en politique, et il s’agit d’un angle mort qui doit être relevé, et ce, également dans cet article.

21 Malinda Smith, 2017, « Discilipary silences : race, indigeneity, and gender in the social sciences », dans Frances Henry, Enakshi Dua, Carl E. James, Audrey Kobayashi, Peter Li, Howard Ramos et Malinda S. Smith (dirs.) Equity Myth, Racialization and Indigeneity, UBC Press, Vancouver, p.243.

22 Sid Ahmed Soussi, 2011, « Diversité ethnoculturelle et conflictualité sociale. Enjeux identitaires ou politiques? », dans Micheline Labelle, Jocelyne Couture et Frank W. Remiggi (dirs.) La communauté politique en question, Regards croisés sur l’immigration, la citoyenneté, la diversité et le pouvoir, Presses de l’Université du Québec Québec, p.223.

23 Catherine Achin et Sandrine Lévêque, 2014, « La parité sous contrôle: Égalité des sexes et clôture du champ politique », Actes de la recherche en sciences sociales, no.4, p.119. doi.org/10.3917/arss.204.0118

24 Laure Bereni, Catherine Marry, Sophie Pochic et Anne Revillard, 2011, « Le plafond de verre dans les ministères : regards croisés de la sociologie du travail et de la science politique », Politiques et Management Public, vol.28, no.2. journals.openedition.org/pmp/4141

25 Il est question ici du terme de minorités visibles tel que défini par Statistiques Canada, : « Il s’agit de personnes, autres que les Autochtones, qui ne sont pas de race blanche ou qui n’ont pas la peau blanche. Il s’agit de Chinois, de Sud-Asiatiques, de Noirs, de Philippins, de Latino-Américains, d’Asiatiques du Sud-Est, d’Arabes, d’Asiatiques occidentaux, de Japonais, de Coréens et d’autres minorités visibles et de minorités visibles multiples. », sur www150.statcan.gc.ca/n1/pub/81-004-x/def/4068739-fra.htm

26 Farida Jalalzai, 2008, « Women Rule: Shattering the Executive Glass Ceiling », Politics & Gender,  vol.4, no.2, p.206. doi.org/10.1017/S1743923X08000317

27 Ibid, p.210 (traduction libre).

28 Andrée-Anne Lacasse, Sarah Jacob-Wagner et Félicité Godbout, op. cit. p.25. www.csf.gouv.qc.ca/wp-content/uploads/avis_femmes_et_politique_web2.pdf

29 Manon Tremblay, 2007, « Democracy Representation and Women : A Comparative Analysis », Democratization, vol.14, no.4, pp.533-553. doi.org/10.1080/13510340701398261

30 Ces pourcentages ne prennent pas en compte les Autochtones qui sont considérés comme un groupe différent. Statistique Canada, 24 avril 2018, « Minorités visibles », Recensement de la ville de Montréal, Profil du recensement 2016www12.statcan.gc.ca/census-recensement/2016/dp-pd/prof/details/page.cfm?Lang=F&Geo1=CSD&Code1=2466023&Geo2=PR&Code2=24&Data=Count&SearchText=Montreal&SearchType=Begins&SearchPR=01&B1=Visible%20minority&TABID=1

31 Rosalie Readman, op. cit.

32 Ibid.

33 Il est à noter qu’aucune information récente sur ce programme n’a pu être trouvée en ligne. Dans un appel à projets en matière d’égalité femmes-hommes pour 2017, le Secrétariat à la condition féminine fait une proposition en continuité des objectifs du programme « À égalité pour décider ».

34 Rosalie Readman, op. cit.

35 Groupe Femmes, Politique et Démocratie, consulté en août 2018, http://gfpd.ca/qui-sommes-nous/le-groupe

36 Mariette Sineau, 2002. « La parité en peau de chagrin ou la résistible entrée des femmes à l’Assemblée nationale ». Revue Politique et Parlementaire, no.10209-1021, p.1.

37 Loc. cit.

38 Ibid, p.10.

39 Ibid, p.1.

40 Ibid, p.2.

41 Pour plus de détails : Journal Officiel de la République Française, 7 juin 2000 : haut-conseil-egalite.gouv.fr/IMG/pdf/JO_Loi_du_6_juin_2000.pdf

42 Mariette Sineau, op. cit.

43 Le Devoir, 2018, « Vigile parité », Le Devoir, Montréal, consulté le 15 août 2018. www.ledevoir.com/documents/special/18-03_vigile-parite-elections/index2_04-06-18.html

44 Guillaume Bourgault-Côté, 11 septembre 2018, « Vigie parité finale : 47,2 % de candidates », Le Devoir, Montréal. www.ledevoir.com/politique/quebec/536530/vigie-parite-finale-47-2-de-candidates

45 Guillaume Bourgault-Côté, 5 juin 2018, « « Vigie parité « , 12e mise à jour: la candidature non genrée d’Hélène Dubé », Le Devoir, Montréal.  www.ledevoir.com/politique/quebec/529507/ni-candidate-ni-candidat

46 Lisa-Marie Gervais, 4 octobre 2018, « Plus de diversité à l’Assemblée nationale », Le Devoir, Montréal. www.ledevoir.com/societe/538298/elections-plus-de-diversite-mais-pas-enc…

47 Pierre-André Normandin, 9 octobre 2018, « Un élu montréalais dénonce les politiques « racistes » de la CAQ », La Presse, Montréal. www.lapresse.ca/actualites/grand-montreal/201810/09/01-5199549-un-elu-montrealais-denonce-les-politiques-racistes-de-la-caq.php