Casino en ligne : le Québec, un exemple à suivre ?

Casino en ligne : le Québec, un exemple à suivre ?

Alors qu’en France, le gouvernement envisage de légaliser le casino en ligne, les professionnel·les en dépendance s’interrogent sur la portée préventive d’une telle mesure. Au Québec, ces jeux sont légaux et encadrés par l’État depuis 2010. Une occasion de voir ce qui a fonctionné, ou non.

Au début, c’était le poker. Puis les machines à sous. Mais c’est avec les jeux de casino en ligne que Jonathan*, résidant en Abitibi-Témiscamingue, a développé une addiction au jeu : « C’est vraiment là que je me suis fait le plus de mal », raconte-t-il. La différence, c’est que le casino en ligne était accessible 24h/24 sur son cellulaire. « Je n’avais pas besoin d’aller nulle part, je restais chez nous. » Il se met alors à jouer dans la cuisine, aux toilettes, et en présence de sa famille.

« Les jeux de casino sont ceux qui génèrent le plus de problèmes pour les joueurs », rapporte Sylvia Kairouz, professeure au département de sociologie et d’anthropologie de l’Université Concordia. Lorsqu’ils sont en ligne, ces jeux sont d’autant plus addictifs qu’ils sont disponibles en tout temps et dénués de contrôle social. « Les joueurs se promènent avec le casino dans leur poche », illustre Mme Kairouz.

Face au risque élevé de dépendance au casino en ligne, les États choisissent de l’interdire ou de le réguler. Au Québec, ces jeux sont légaux et régis par le gouvernement provincial, par l’entremise de Loto-Québec. En France, ils restent interdits, mais le gouvernement a annoncé cet automne son intention de les légaliser. Pour évaluer si la légalisation peut permettre un encadrement plus efficace, L’Esprit Libre s’est entretenu avec des expert·es en prévention des deux côtés de l’Atlantique.

France : légaliser pour encadrer

« On sait bien que c’est mieux de réguler que de prohiber », soutient Emmanuel Benoit, directeur général de l’Association de recherche et de prévention des excès du jeu (Arpej). Pour lui, la légalisation des jeux de casino virtuels en France serait un moyen d’encadrer les pratiques des joueurs, qui ont déjà accès à une offre illégale. Selon l’Autorité nationale du jeu (ANJ), entre trois et quatre millions de Français jouent chaque année à des jeux de casino en ligne sur des sites illégaux[1]. Le problème, c’est que « ces sites illicites ne prennent pas soin du joueur, il n’y a pas de prévention ni de réduction des risques », alerte le directeur de l’Arpej.

La création de plateformes agrées par l’État permettrait la mise en œuvre de mesures préventives, comme l’interdiction de jeu aux moins de 25 ans, des sessions qui ne dépassent pas deux heures, ou la possibilité de s’auto-exclure, propose M. Benoit. Des « niveaux de sécurisation », selon ses termes, qui favoriseraient une pratique de jeu plus responsable.

Ces dispositions ne sauront être véritablement efficaces si les plateformes illégales, dénuées de tout contrôle, demeurent. « L’idée, c’est aussi de faire en sorte que ces sites illicites ne puissent plus exercer, en luttant de manière encore plus forte [contre eux] », réclame le directeur de l’Arpej, qui reconnaît néanmoins qu’il sera difficile de les supprimer complètement. « Ce qui est important, c’est que la partie congrue soit la plus faible possible », estime-t-il.

Malgré la persistance très certaine d’une offre illégale, M. Benoit espère que les joueur·ses seront attiré·es par les garanties de sécurité de l’offre légale. Contrairement à leurs concurrents illicites, les sites légaux assurent aux client·es la sécurité de leur compte, de leur identité et du paiement. « Quand un opérateur a une image de fiabilité, ça marche beaucoup mieux qu’un opérateur dont on pense qu’il peut tricher », soutient le Français.

Légaliser sans précipiter

Seul pays de l’Union Européenne, avec Chypre, à interdire les jeux de casino en ligne, la France est allée de l’avant à l’automne dernier, en déposant un amendement en vue de les légaliser. Le gouvernement s’est toutefois heurté à la résistance des organismes en prévention. « C’était un peu la stupéfaction et la colère, parce que si vous voulez, ça a été fait sans préparation », raconte M. Benoit. S’ils sont plutôt favorables à une légalisation, les professionnel·les français de l’addictologie estiment néanmoins que la décision ne peut « s’ouvrir par un simple décret qui tombe comme cela pour faire de l’argent », comme le dénonce le directeur de l’Arpej. Une légalisation pourrait en effet rapporter près d’un milliard d’euros à l’État[2].

À l’image de ses confrères et consœurs en addictologie, M. Benoit appelle à « un temps de préparation, de concertation et d’équipement. » Légaliser une pratique aussi addictive nécessite de mettre la protection du joueur au centre des débats, demandent les organismes et les expert·es. Sans véritable plan d’encadrement, l’ouverture des jeux de casino en ligne risque de renforcer davantage l’addiction plutôt que de la prévenir.

Québec : une légalisation d’abord économique

Si les organismes français en prévention réclament aujourd’hui un processus de consultation, celui-ci n’a pas eu lieu au Québec, lorsque le casino en ligne était légalisé en 2010. « Il n’y en a pas eu, ils faisaient juste élargir leur offre », se souvient Anne Élizabeth Lapointe, directrice générale de la Maison Jean Lapointe, qui traite les dépendances. À l’époque, plusieurs acteur·rices de la société civile critiquent le manque de considérations du gouvernement pour les impacts sur la santé publique, réclamant l’implication d’expert·es dans la mise en œuvre de la politique[3].

Pour la chercheuse à l’Université Concordia Sylvia Kairouz, l’État québécois a offert ces jeux en ligne « pour des raisons économiques. » N’ayant aucun contrôle sur l’offre illégale, la société d’État Loto-Québec a développé sa propre plateforme pour « récupérer une partie de ce marché », estime-t-elle. Le casino en ligne intègre ainsi la gamme des jeux d’argent et de hasard régulés par l’État, comme le loto, les paris sportifs ou les casinos terrestres.

Un manque d’encadrement

L’autre enjeu, la santé publique, a été relégué au second plan par la légalisation québécoise, qui ne s’est pas accompagnée d’une stratégie d’encadrement suffisante, selon les expertes rencontrées. « Au Québec, on a une offre, c’est tout », regrette Mme Kairouz. 

Encadrer des pratiques aussi addictives, « ça prend une autorité indépendante », plaide la chercheuse. Contrairement à la France, qui dispose de l’Autorité nationale des jeux, la Belle Province ne s’appuie sur aucune institution indépendante pour réguler l’offre de jeu. Ici, les décisions sont entre les mains de la plateforme elle-même, soit Loto-Québec. Pour illustrer cette situation, Mme Kairouz reprend la métaphore d’une collègue : « Laisser Loto-Québec décider, c’est comme demander à Dracula de surveiller la banque de sang. » 

La société d’État affirme toutefois « offrir aux joueurs un environnement de jeu à la fois intègre, divertissant et sécuritaire », grâce à des mesures de commercialisation responsable et des programmes de sensibilisation. Si Mme Lapointe reconnaît les efforts fournis par Loto-Québec pour inciter au jeu responsable, elle estime qu’ils « pourraient en faire plus, évidemment. » Pour Mme Kairouz, ces mesures servent juste « l’image corporative » de la société d’État. De son côté, Loto-Québec n’a pas donné suite aux sollicitations d’entrevue de L’Esprit Libre.

Une offre illégale persistante

En parallèle, les sites de jeux illégaux sont toujours aussi nombreux qu’en 2010, tout comme les joueur·ses qui les fréquentent[4]. « C’est une suite infinie de jeux, il y en a de toutes les sortes, toutes les semaines », témoigne Jonathan, ancien joueur de casino en ligne. Loto-Québec estime capter 50% du jeu en ligne dans la province. L’autre moitié des joueur·ses continue de fréquenter les sites illicites, qui représentent une concurrence importante pour les services de l’État. Gérées par des sociétés privées souvent déclarées à l’étranger, ces plateformes échappent encore majoritairement aux tentatives de blocage.

En présence de ces deux offres, Jonathan admet préférer les sites illicites à Loto-Québec, car plus attractifs. Ces plateformes ne sont en effet soumises à aucune limite, et peuvent inciter les joueurs autant qu’elles le veulent. « Tu reçois des promotions à tout bout de champ, on te dit “Hey, t’as pas joué depuis longtemps, reviens on va te donner de l’argent”», raconte le joueur désormais abstinent. 

Finalement, en rendant le casino en ligne légal au Québec, Mme Kairouz ne sait pas « si on a vraiment protégé la population. » L’offre est simplement plus grande, tout comme le nombre de joueur·ses, qui connaît une ascension exponentielle depuis 10 ans[5].

Le Québec, un contre-exemple ?

Si les expertes rencontrées à Montréal ne sont pas défavorables en théorie à la légalisation du casino en ligne, elles estiment qu’au niveau de l’encadrement, « le Québec est l’exemple à ne pas suivre », pour reprendre les termes employés par Mme Kairouz. La Belle Province devrait même selon elle « regarder vers la France », qui dispose d’une autorité indépendante pour réguler le jeu, et qui laisse davantage place au débat dans le cadre de la légalisation.

De son côté, Mme Lapointe appelle le législateur français à « s’assurer qu’il n’y aura pas de débordement et que les gens ne laisseront pas leur peau. Parce que finalement, c’est un peu ça qu’on voit ici, malheureusement. »

*Le prénom a été modifié pour préserver l’identité du témoin.


[1] https://anj.fr/casinos-en-ligne-lanj-lance-une-campagne-dinformation  

[2] https://www.francetvinfo.fr/replay-radio/le-brief-eco/casinos-en-ligne-le-gouvernement-suspend-leur-legalisation_6835988.html

[3] https://www.assnat.qc.ca/fr/exprimez-votre-opinion/petition/Petition-91/index.html

[4] chrome-extension://efaidnbmnnnibpcajpcglclefindmkaj/https://cdn-contenu.quebec.ca/cdn-contenu/adm/min/finances/publications-adm/AUTFR_69_Analyse_jeux_en_ligne.pdf

[5] https://www.ledevoir.com/societe/786288/explosion-de-l-engouement-pour-les-jeux-d-argent-en-ligne-pendant-la-pandemie?

Plus qu’un jeu : les ravages de la dépendance aux jeux de hasard et d’argent

Plus qu’un jeu : les ravages de la dépendance aux jeux de hasard et d’argent

Les jeux de hasard et d’argent soulèvent de nombreuses préoccupations de santé publique au Québec. Sans conséquence pour certains, ils peuvent engendrer une dépendance pour d’autres et avoir des conséquences graves dans leur vie.

Loto-Québec fête cette année ses 55 ans. Sur son site internet, la société d’État indique que sa mission est de « gérer l’offre de jeux de hasard et d’argent de façon efficiente et responsable en favorisant l’ordre, la mesure et l’intérêt de la collectivité québécoise »[1]. Pourtant, de nombreux Québécois et de nombreuses Québécoises se retrouvent avec un problème de dépendance aux jeux de hasard et d’argent, ce qui peut avoir un impact négatif dans leur vie et dans celle de leurs proches.

Une enquête de Katia Gagnon et William Leclerc parue dans La Presse en septembre 2018 porte sur les suicides liés à la dépendance aux jeux de hasard et d’argent. Selon cet article, nommé « Le jeu qui tue », en moyenne 18 joueurs pathologiques se sont enlevé la vie chaque année depuis 1995 au Québec[2]. La période entre 1999 et 2004 est la plus meurtrière avec 28 suicides par an. Elle coïncide avec les années où le nombre d’appareils de loterie vidéo était le plus élevé sur le territoire québécois. Le pic maximal a été atteint durant cette période, c’est-à-dire qu’entre 14 000 et 15 000 machines étaient disponibles dans les bars et casinos au cours de ces cinq années.

De plus, une étude de la Direction de la santé publique de Montréal (DSP) datant de 2016 a révélé que l’accessibilité semble plus grande dans des zones défavorisées sur le plan socio-économique, ce qui fait en sorte que les individus qui sont plus à risque de développer une dépendance aux jeux de hasard et d’argent se retrouvent dans un environnement plus susceptible de déclencher cette dépendance. Les conséquences engendrées par la dépendance aux jeux sont nombreuses : faillite, problèmes familiaux, abus de substances, dépression, anxiété, problèmes d’argent, suicides, etc.

Un accès facile

L’accès aux jeux de hasard et d’argent est facilité avec la place grandissante qu’occupent les technologies dans le quotidien de chacun. En 2024, rares sont ceux et celles qui ne disposent pas d’un téléphone intelligent. Selon l’étude annuelle NETendances de l’Académie de la transformation numérique de l’Université Laval, 84 % des adultes québécois avaient un téléphone intelligent en 2022 et 53 % des adultes québécois affirmaient passer trop de temps devant leurs écrans[3].

Non seulement ces appareils créent eux-mêmes une dépendance, mais ils mettent à la disposition des joueurs un moyen d’accéder facilement et en tout temps à des sites de jeux en ligne. De plus, un document disponible sur le site de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) appelé « Les préjudices liés aux jeux de hasard et d’argent en ligne : de l’identification à l’action de santé publique » révèle des faits alarmants[4].

Parmi les informations essentielles, on apprend qu’en 2018, le nombre de joueurs au Québec était estimé à 4,2 millions. De ce nombre, 2 % sont des individus avec des problèmes de jeux, mais pour les adeptes de jeux en ligne, les chiffres montent à 23 %. Les données font aussi état d’une croissance de 37,5 % des revenus d’Espace Jeux en 2017 et 2018, ce qui témoigne d’un essor dans l’adoption du jeu en ligne au Québec[5].

Les joueurs en ligne sont donc plus susceptibles de développer une dépendance au jeu, mais ils risquent également de dépenser des montants d’argent plus importants. « Les données de prévalence au Québec révélaient en 2012 que le jeu en ligne occasionne des dépenses sept fois plus importantes que les autres types de jeu […]. Le jeu en ligne ne constitue donc pas un divertissement inoffensif. »[6]

Les effets de la pandémie

Ce problème est devenu d’autant plus inquiétant lorsque la COVID‑19 a forcé la fermeture des casinos et des commerces et a isolé les citoyens chez eux. Christophe Miville-Deschênes, coordinateur clinique à la Maison L’Odyssée, a constaté l’effet désastreux qu’a eu la pandémie sur les personnes aux prises avec une dépendance au jeu. Le centre de traitement, fermé lors de la pandémie, a pu accueillir à nouveau des patients en 2022.

 À ce moment, M. Miville-Deschênes a remarqué que certaines personnes qui ne jouaient pas avant la pandémie avaient commencé et que d’autres qui jouaient en personne au casino ou dans les bars s’étaient réfugiés sur les sites de jeux en ligne. Une personne, qui avait cessé de jouer pendant de nombreuses années, a aussi recommencé à jouer pendant la pandémie, dit-il.

Une enquête menée par Sylvia Kairouz de l’Université Concordia et Annie-Claude Savard de l’Université Laval montre que la pratique du jeu en ligne a triplé entre 2018 et 2020. L’étude, qui s’intéresse aux effets de la pandémie sur les habitudes de jeu des Québécois et des Québécoises, signale que peu de joueuses et de joueurs ont cessé leur pratique avec la fermeture des lieux de jeu, que certaines et certains ont migré vers les jeux en ligne et que de nouvelles joueuses et de nouveaux joueurs ont commencé à jouer en ligne[7].

Parmi les joueuses ou les joueurs continus (c’est-à-dire celles et ceux qui jouaient avant la pandémie et qui ont continué à le faire lors de celle-ci), 31 % ont déclaré avoir parié plus sur les jeux de hasard et d’argent comparativement à avant la COVID-19. Davantage de joueuses et de joueurs en ligne ont aussi déclaré avoir augmenté la fréquence à laquelle ils s’adonnent aux activités de jeux en ligne que de joueuses et de joueurs qui ont diminué leur fréquence de jeu en raison de la pandémie; les dépenses qui y sont associées et le temps passé à jouer sur ces plateformes sont aussi plus importants. Ces données semblent confirmer celles présentées dans le document de l’INSPQ.

L’étude mentionne également que celles et ceux qui ont avoué jouer davantage durant la pandémie ont affirmé que c’était parce qu’ils avaient plus de temps libre, qu’ils se sentaient seules ou seuls, ou encore qu’ils ne pouvaient pas acheter de billets de loterie en personne ou parce que le jeu les aidait à se détendre. Environ 20 % d’entre eux ont admis jouer plus en raison d’un besoin financier.

Une dépendance qui coûte cher

C’est d’ailleurs durant la pandémie de COVID-19 que la dépendance au jeu de David Fournier-Melançon s’est réellement développée. L’homme, qui avant pariait de petites sommes avec des amis pour le plaisir, a commencé à jouer sans s’imposer de limites. Avec le confinement, il passait inévitablement plus de temps chez lui et il s’ennuyait. Sa vie personnelle allait moins bien à ce moment aussi. Il a donc cherché un moyen de se divertir.

Ce qui le motivait était selon lui l’appât du gain. Il gagnait des petits montants et croyait qu’il allait gagner plus par la suite. De cette façon, il a misé près de 200 000 $ en un an sur Espace jeux, la plateforme de jeux en ligne de Loto-Québec. « En juillet 2022, j’avais dépensé le montant de mon prêt à 34 % et j’étais rendu à aller voir un shylock à 200 % d’intérêt. J’ai compris que j’avais un problème », admet-il. Lorsque sa conjointe l’a su, elle lui a posé un ultimatum : « tu vas en thérapie ou c’est fini! ». C’est à ce moment qu’il s’est rendu à la Maison L’Odyssée pour chercher de l’aide. Au moment de l’entrevue, à la fin de 2023, il fêtait une première année loin de sa dépendance au jeu.

De nombreux coûts sociaux sont associés à cette dépendance : les soins pour les problèmes de santé, les coûts juridiques et judiciaires, les coûts en service policiers et pénaux ainsi que des coûts liés au traitement qui sont utilisés pour la prévention et la recherche.

Mieux vaut prévenir

La société d’État, qui a le monopole sur les jeux de hasard et d’argent au Québec, engendre des profits astronomiques. En 2023, Loto-Québec a rapporté près de 3 milliards de dollars, ce qui représente une augmentation significative de son revenu comparativement aux années précédentes[8]. Une partie de ces profits est redistribuée en tant que dividendes au gouvernement québécois. Au terme de son exercice 2023-2024, Loto-Québec a rapporté avoir remis 1,5 milliard de dollars à ce dernier, qu’il doit, de son côté, investir en prévention[9].

Pourtant, M. Fournier-Melançon déplore le manque de prévention liée à la dépendance aux jeux de hasard et d’argent. « Le jeu, ce n’est pas quelque chose dont on parle du tout et ce n’est pas quelque chose qui se voit, contrairement à l’alcool ou aux drogues », dit-il. Quant à l’avertissement qui apparaît sur le site de Loto-Québec après une heure de jeu, il croit qu’il n’est pas très utile. « On peut jouer tant qu’on le veut », lance-t-il. Il avoue que lorsque le message apparaissait, s’il avait une bonne journée avec des gains, il ne s’en préoccupait pas : « Il n’y a pas grand-chose qui t’empêche de jouer, à part t’exclure ».

Selon lui, les profits engendrés sont trop importants pour qu’une limite soit imposée : « En arrière de ça, il y a toujours un signe de dollar et personne ne va mettre de limitations tant que l’argent rentre ». M. Fournier-Melançon a pris les choses en main pour s’en sortir en s’excluant du site de Loto-Québec pour une période d’un an et en se tournant vers la Maison L’Odyssée pour de l’aide. Il croit qu’il est fondamental d’arriver en thérapie avec la bonne attitude et le désir de s’en sortir et il aimerait que ceux et celles qui souffrent de cette dépendance soient au courant de l’aide offerte. « Ce serait important que les gens sachent qu’il y a des ressources ». Pourtant, même si près de 41 % des joueurs en ligne disent connaître les services d’aide, seulement 2,4 % d’entre eux avouent les avoir utilisés.[10] Les maisons de traitements sont toutes indiquées pour aider ceux et celles qui souffrent de cette dépendance. La Maison l’Odyssée à Sainte-Marie et la Maison Jean Lapointe à Montréal offrent des traitements liés à la participation excessive aux jeux de hasard et d’argent. Info-Santé peut également offrir du soutien et informer les personnes qui le désirent sur les ressources disponibles.

La mission de la Maison L’Odyssée est de venir en aide aux personnes aux prises avec un problème de dépendance au jeu et de cyberdépendance. Elle offre des thérapies et du soutien à ceux et celles dans le besoin. La prévention est également au programme, puisque « le jeu est à portée de main », l’organisme communautaire s’assure donc de faire de la sensibilisation, entre autres, en informant sur les risques associés à ces dépendances[11]. De son côté, l’ancien joueur est sans équivoque : « ça a changé ma vie pour le mieux », lance-t-il, soulagé. Il travaille dorénavant pour la Maison L’Odyssée et tente d’aider les joueurs compulsifs dans le besoin.


[1] Loto-Québec, « Engagée pour la collectivité », 2023, Plan de responsabilité sociétale 2023-2028 de Loto-Québec (lotoquebec.com)

[2] Katia Gagnon et William Leclerc, « Le jeu qui tue », La Presse, 28 septembre 2018, Le jeu qui tue – La Presse+

[3] Université Laval, « Portrait numérique des foyers québécois », 2022, NETendances 2022 Portrait numérique des foyers québécois (ulaval.ca)

[4] Institut national de santé publique, Les préjudices liés aux jeux de hasard et d’argent en ligne : de l’identification à l’action de santé publique, 2018 « Les préjudices liés aux jeux de hasard et d’argent en ligne : de l’idenfication à l’action de santé publique (inspq.qc.ca) »

[5] Ibid.

[6] Ibid.

[7] Enquête Enhjeu.com, «Portrait des jeux de hasard et d’argent en ligne au Québec : regards sur une transformation amorcée en temps de pandémie», 15 mars 2023, « Microsoft Word – Rapport projet COVID-2023-03-14-FINAL.docx (concordia.ca)»

[8] Statista, «Loto-Québec : revenue 2023», 2023, Loto-Québec: revenue 2023 | Statista

[9] Frédéric Lacroix-Couture, «Loto-Québec a versé un dividende de 1,5 milliard au Trésor québécois», Le Devoir, 6 juin 2024, Loto-Québec a versé un dividende de 1,5 milliard au Trésor québécois | Le Devoir

[10] Op. Cit., note 7.

[11] Maison L’Odyssée, Maison L’Odyssée – Traitement du jeu et prévention à Sainte-Marie (maisonlodyssee.com)