Brexit : Quand la bombe explosa

Brexit : Quand la bombe explosa

Par Antoine Foisy

Le 23 juin dernier fut probablement la journée qui a le plus marqué l’histoire de l’Union européenne depuis sa fondation. Pour la première fois, un État membre –et non le moindre–, le Royaume-Uni, a voté par une mince majorité en faveur d’une sortie de l’Union. Maintenant que la poussière est retombée, il nous est possible de faire un bilan de ce vote et d’y entrevoir une perspective d’avenir.

À la suite de ce référendum, la menace la plus immédiate et la plus dangereuse pour le Royaume-Uni est le risque de sécession de régions constitutives du pays, car un tel démembrement affecterait la position économique et politique de la nation dans le monde. Ce n’est pas une simple menace lancée par les pro-UE durant la campagne, mais bel et bien un événement qui risque de se produire. En effet, plusieurs d’entre elles, notamment l’Écosse, ont averti le gouvernement de Londres que si leur volonté n’était pas respectée, leurs gouvernements respectifs pourraient mettre en branle des mesures pour leur accession à l’indépendance afin de faire respecter leur choix.

Tout au long de la campagne du référendum, la première ministre écossaise, Nicola Sturgeon, fut la plus agressive sur le sujet, affirmant qu’elle n’hésiterait pas à mettre en branle un second référendum sur l’indépendance écossaise si la volonté des Écossais  n’était pas prise en compte. L’argumentaire de la première ministre se fondait sur le respect de l’expression populaire; effectivement, par une majorité de 62 %, les Écossais ont préféré opter pour le camp du « Remain ». Le camp du « Leave » remporta cependant la campagne à hauteur de 52 %, majoritairement grâce aux Anglais. Pour Nicola Sturgeon, il s’agit donc d’un véritable non-respect de la démocratie que sa région soient entraînée hors de l’UE alors que ses habitants souhaitaient majoritairement demeurer au sein de celle-ci. Il ne lui fallut évidemment pas beaucoup de temps pour annoncer que la tenue d’un référendum portant sur l’indépendance de l’Écosse devait avoir lieu bientôt. Le maintien du Royaume-Uni dans l’Union européenne était même l’argument qui a convaincu de nombreux Écossais de voter contre l’indépendance lors de leur référendum de 2014. Suite à cette sortie forcée, un député du Scottish National Party déplore le fait que les grands partis traditionnels ont induit les Écossais en erreur lors du référendum de 2014, exprimant l’importance pour de nombreux citoyens de mener un second référendum sur l’accession à l’indépendance.

« Ils ont clairement induit en erreur les Écossais » – John Nicolson, député du SNP

Un peu plus à l’ouest, en Irlande du Nord, la situation ne semble guère plus stable suite aux résultats du vote. À l’instar des Écossais, les Nord-Irlandais ont voté en majorité pour rester au sein de l’Union européenne. Au vu du résultat, les citoyens militant pour que l’Irlande du Nord se sépare du Royaume-Uni ont eux aussi affirmé que cette sortie imposée de l’UE ne tenait pas compte de la volonté des habitants de leur région. Ils ont donc demandé un référendum afin de réunir la République d’Irlande et l’Irlande du Nord. En revanche, la question de la tenue d’un tel référendum est beaucoup plus sensible en Irlande du Nord que chez leurs voisins écossais de par les tensions persistantes entre les catholiques et les protestants, ceci malgré l’accord du Vendredi saint de 1998, qui mit fin au conflit nord-irlandais durant lequel s’affrontèrent le gouvernement britannique et des groupes nationalistes irlandais souhaitant le rattachement à l’Irlande. En effet, outre la controversée différence de vote selon le niveau de scolarité des habitants, une seconde fracture confessionnelle a aussi fait pencher la balance : alors que les Nord-Irlandais catholiques ont appuyé le camp du « Remain », la majorité protestante à quant à elle appuyé le camp du « Leave ». Cela a donc vivement réanimé les tensions religieuses qui s’étaient relativement apaisées depuis 1998.

Un tel exercice démocratique est très sensible pour nombre d’Irlandais, qui ont vécu la période des Troubles entre les troupes de l’IRA et le gouvernement britannique au cours de la seconde moitié du XXe siècle. Déjà, le premier ministre irlandais, Enda Kenny, a affirmé que le plus important pour le moment était d’atténuer les dommages causés par les récents événements et non d’ouvrir les anciennes blessures, comme on pouvait le lire dans La Presse (Paul Kelbie et Shawn Pogatchnik, 24 juin 2016). L’idée de revenir sur la question de la réunification est donc un sujet que peu de politiciens cherchent à aborder afin de préserver la paix, d’autant que si le Royaume-Uni venait à se retirer pour de bon de l’Union européenne, une frontière entre les deux Irlande serait instaurée.

Du côté du gouvernement britannique, le premier ministre David Cameron et sa secrétaire d’État à l’Irlande du Nord, Theresa Villiers, ont eux aussi cherché à ne pas échauffer les esprits en déclarant qu’une décennie de sondages a prouvé qu’il n’y avait pas d’intérêt pour une telle question. Toutefois, ils ont reconnu que le pacte de 1998 comprenait une clause permettant la réunification à la demande la population. Le parti catholique nationaliste Sinn Féin, qui fait partie du gouvernement d’unité, soutient quant à lui que la population a le droit de se prononcer sur sa sortie du Royaume-Uni pour les mêmes raisons que celles évoquées par le gouvernement écossais.

Bref, le référendum sur le maintien du pays au sein de l’Union européenne est véritablement la boîte de Pandore qui vient déballer toutes les revendications d’indépendance entretenues par les deux principales régions formant le Royaume-Uni avec l’Angleterre, qui furent si longtemps gardées sous contrôle. Le cas écossais est d’autant plus difficile à réprimer qu’il suit une voie tout à fait démocratique et ne subit pas les contrecoups d’un traumatisme récent dû à un conflit. Le danger pour le Royaume-Uni est que l’opinion publique écossaise semble de plus en plus pencher en faveur de l’indépendance malgré l’échec de la dernière consultation, avec 55 % des voix contre et 45 % pour. Parmi les raisons qui motivent ces derniers à opter pour la séparation d’avec Londres se trouve l’impression de retourner à l’époque où les Anglais décidaient de la voie à suivre sans les consulter. L’indignation ressentie par les Écossais peut donc favoriser encore plus la volonté d’indépendance d’une population qui sent depuis un certain moment qu’elle ne possède plus sa place au sein du pays.

Dans le cas de l’Irlande du Nord, comme mentionné plus haut, la question est plus délicate puisque les tensions religieuses sont toujours vivaces. Il reste qu’une certaine partie de la population s’affiche ouvertement en faveur d’une séparation d’avec le Royaume-Uni. Peut-être s’agit-il simplement d’une opportunité saisie par les nationalistes, ou bien est-ce le signe d’une véritable volonté populaire; dans cette situation seul le temps saura nous apporter la réponse. De nombreux problèmes plus pressants risquent pour le moment d’absorber l’énergie et le temps des autorités politiques, autant à Londres qu’à Dublin, qui va chercher à protéger ses relations commerciales avec la Grande-Bretagne, son premier partenaire commercial. Les autorités ne voudront probablement aborder le dossier de l’indépendance nord-irlandaise pour éviter d’éveiller les tensions.

Tout cela risque de provoquer une reconfiguration géographique, économique et surtout politique du Royaume-Uni. Même si l’Angleterre est le moteur économique et culturel du pays, si l’Écosse obtient son indépendance, il s’agira d’une énorme perte pour Londres, qui se verrait ainsi privé des revenus engendrés par la production pétrolière écossaise en mer du Nord, sans parler des bouleversements sur les marchés économiques et pour les entreprises installées en Écosse.

CRÉDIT PHOTO: Daniel Hamersky

Brexit : danger au Royaume-Uni

Par Antoine Foisy

Les élections générales du printemps 2015 ont causé de nombreuses surprises au Royaume-Uni. L’une d’elles s’est démarquée du lot et risque d’entraîner plusieurs conséquences importantes tant au niveau national qu’international : la promesse de la tenue d’un référendum sur le maintien ou non du Royaume-Uni au sein de l’Union européenne. De par les liens étroits de Londres avec l’Europe continentale, l’éventualité de la sortie du pays de la zone euro provoque un débat dans lequel les positions sont fortement polarisées et les enjeux, décisifs. Le résultat de ce référendum chamboule le climat politique anglais, tout comme de nombreuses carrières, notamment celle du premier ministre David Cameron.

L’annonce de la tenue d’un référendum sur le maintien ou le retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne peut sembler aussi surprenante que bizarre. En effet, contrairement à quelques-uns de ses voisins, le Royaume-Uni n’a pas subi de crise économique comme ce fut le cas en Grèce, en Espagne et en Italie; l’économie du pays va même plutôt bien pour un pays qui a durement été touché par la crise financière de 2008. De plus, son taux de chômage est en baisse depuis de nombreuses années, à l’inverse de son voisin français.

Les raisons motivant ce référendum ne sont donc pas d’ordre économique ; elles seraient plutôt majoritairement issues de considérations politiques. En fait, lors de la dernière campagne électorale, au printemps 2015, le Parti conservateur de David Cameron s’est retrouvé face à plusieurs adversaires assez influents qui menaçaient son accession à un mandat de gouvernement majoritaire.

D’un côté, le Parti travailliste (Labor) et le Parti national écossais (SNP) attiraient un certain nombre d’opposants au Parti conservateur. Cette opposition au Parti conservateur s’est surtout confirmée en Écosse, où le SNP a récolté 56 des 59 sièges dévolus à la région. Pour sa part, même s’il était rarement en tête dans les sondages et que ses résultats étaient plutôt décevants, le Parti travailliste représentait en Angleterre la seule alternative possible à un gouvernement conservateur et ce, malgré la présence de plusieurs tiers partis (résultat du mode de scrutin uninominal à un tour).

D’autre part, le nouveau parti eurosceptique de droite Ukip représentait potentiellement la plus grande menace en ce qui concerne les électeurs qui votent traditionnellement conservateur, car il risquait de voler bon nombre d’électeurs au Parti conservateur. Ce parti, dirigé à l’époque par Nigel Farage, proposait que le Royaume-Uni se retire de l’Union européenne afin de pouvoir adopter des lois et mesures en lien direct avec les besoins du pays. Bien entendu, une telle position attira, dès la formation du parti, de nombreux conservateurs qui n’approuvaient aucunement l’adhésion du pays à l’Union européenne. Fidèles à leur programme, ils proposaient que le Royaume-Uni se retire de l’UE afin d’être en mesure de mieux se gouverner, notamment en matière d’immigration. Ce projet recevant un accueil plutôt favorable de la part de l’électorat conservateur, David Cameron, forcé de réagir, proposa la tenue d’un référendum sur le maintien de l’État anglais au sein de l’UE. C’est donc sous l’angle de la stratégie électorale que David Cameron a été contraint de promettre ce référendum, afin de rallier à son parti les eurosceptiques conservateurs et ainsi réduire les chances de l’Ukip de percer électoralement. Stratégiquement, il s’agit d’un succès puisque le parti eurosceptique n’a réussi qu’à faire élire un seul député et à faire perdre les élections au chef Nigel Farage.

Par ailleurs, le raisonnement des deux camps repose sur des arguments de nature économique et de souveraineté nationale. Pour les partisans du brexit, le fait de quitter l’Union européenne a pour objectif de permettre au royaume de décider par lui-même et pour lui-même les politiques économiques adaptées à sa situation. Ils ne veulent plus que les politiques économiques anglaises soient encadrées par ce que l’UE décide. Bien sûr, l’argent vient jouer un rôle prépondérant dans l’argumentaire pro-brexit. Le chiffre de 13 millions de livre sterling, cotisation du Royaume-Uni à l’Union européenne, est devenu le montant magique des pro-brexit. Ces derniers proposent de réinvestir ce montant dans les besoins de premier ordre des britanniques, surtout dans ces temps d’austérité imposée par David Cameron. Ils suggèrent donc d’investir cette somme sauvée de l’UE dans le système national de santé.

Outre l’aspect économique de la question, l’argumentaire pro-brexit repose aussi sur la volonté de reprendre le contrôle des frontières du Royaume-Uni. Selon ces derniers, le statu quo empêche l’État de bien protéger sa frontière contre les éléments qui pourraient mettre en danger les citoyens britanniques et ceux qui pourraient s’installer illégalement au pays dû à la libre circulation des individus au sein de l’UE. Les pro-brexit accusent les migrants de l’UE de venir s’installer au Royaume-Uni pour profiter des services sociaux offerts et ainsi faire grimper la facture. Le retrait de la Grande-Bretagne permettrait donc de réaliser des économies considérables selon eux. De plus, toujours selon les pro-brexit, un meilleur contrôle aux frontières possible grâce à un retrait du pays de l’UE assurerait une meilleure protection contre de potentiels attentats terroristes. Les terroristes, profitant de la libre circulation, pourraient entrer au pays via la France ou d’autres pays de l’UE et perpétrer des attentats en sol britannique. Dans cette optique, mettre fin à la libre circulation réduirait énormément les chances d’attentat.

Derrière ces deux volets majeurs de l’argumentaire pro-brexit, il y existe aussi un élément un peu plus subtil, mais qui est un moteur puissant. Comme on pouvait le lire dans l’article de LA PRESSE du 16 juin dernier, « Grande-Bretagne: Brexit, guerre et crise existentielle« , la Grande-Bretagne se retrouve depuis quelques décennies, mais plus clairement depuis le référendum sur l’indépendance écossaise, dans une sorte de crise existentielle. En effet, de nombreuses personnes, notamment dans les tranches plus âgées de la population, sont toujours nostalgiques de la place prépondérante qu’occupait la Grande-Bretagne il y a de cela un peu d’un siècle. À cette époque, le pays régnait sur un empire qui comprenait un quart de la population mondiale et d’où vient l’expression : « l’empire où le soleil ne se couche jamais« . Selon Michael Skey, spécialiste des questions identitaires à l’Université de Loughborough cité dans l’article, le référendum sur le Brexit est une incapacité de la part des Britanniques à faire le deuil de l’ancien empire :

«Ce référendum sur le Brexit trahit notre incapacité à faire le deuil de l’empire. Ceux, surtout les plus âgés, qui ne se reconnaissent plus dans une société de plus en plus diversifiée sont sensibles à un discours qui leur propose de monter dans une machine à remonter le temps et de tout recommencer. Ils se disent: ah! si seulement on pouvait quitter cette foutue Europe et redevenir une grande nation».

Il explique cette importance du passé par le fait qu’à ce moment, le Royaume-Uni pouvait faire une différence dans la politique internationale, alors que depuis la crise du canal de Suez, le royaume est relégué au rang de puissance secondaire au même titre que d’autres puissances européennes. Le Royaume-Uni souffrirait donc d’une sorte de nostalgie collective qui l’aurait empêché d’embarquer avec enthousiasme dans le projet de l’Union européenne. En effet, selon Sunder Katwala,, directeur du groupe de réflexion « British Future«  et lui aussi cité dans l’article, le sentiment de gloire qu’éprouva la Grande-Bretagne suite à la Seconde Guerre mondiale dû au fait qu’il s’agissait pratiquement du seul pays à sortir de la guerre sans trop de taches provoqua une certaine indifférence de la part du gouvernement britannique.

«Au sortir de la guerre, dit-il, la Grande-Bretagne, persuadée de toujours faire partie du Top 3, a considéré le projet européen avec un certain détachement. Lorsqu’il est devenu évident avec la crise du canal de Suez dans les années 1950 qu’il s’agissait là d’une erreur, le train de l’union était déjà parti», Sunder Katwala.

Dans le camp contre-brexit, l’argumentaire se résume principalement autour de la question économique, fer de lance de la campagne. Ces derniers, avec comme tête de liste David Cameron, affirment qu’une sortie de l’UE entraînerait un ralentissement de la croissance, un taux de chômage plus élevé ainsi que des prix plus élevés en raison de barrières tarifaires. Les banques centrales affirment aussi que dans le cas d’une victoire du brexit, les effets pourraient se faire sentir sur les marchés mondiaux, et non seulement européen, vu la place cruciale de Londres dans le système financier.

Conséquences du référendum

Un référendum sur un tel enjeu ne peut qu’entraîner des conséquences décisives, autant sur la cohésion du Royaume-Uni qu’au niveau des carrières de certains politiciens.

En ce qui concerne l’unité du pays, la victoire du oui (donc une sortie de l’Union européenne) pourrait agir comme un élément catalyseur pour le mouvement indépendantiste écossais. Effectivement, alors qu’en Angleterre la population est beaucoup plus partagée sur la question –environ 50-50–, les Écossais éprouvent un sentiment beaucoup plus favorable envers le maintien du pays dans l’Union européenne. Selon un sondage publié dans un article du journal Le Monde, « un “Brexit” relancerait la perspective d’une indépendance écossaise », 50 % des Écossais étant favorables au maintien du pays au sein de l’UE, alors que seulement 35 % sont pour le retrait. Nicola Sturgeon, chef du SNP et première ministre d’Écosse, a déclaré qu’il ne serait pas démocratique que Londres se retire de l’Union européenne puisque le gouvernement ignorerait la volonté de ses citoyens écossais.

Le fait que le gouvernement de Londres refuse de prendre en considération la volonté des Écossais donnerait une bonne raison au SNP de déclencher une seconde campagne référendaire sur la base que les intérêts de l’Écosse ne sont pas pris en compte dans les politiques de David Cameron. Une victoire du camp favorable à la sortie provoquerait ainsi une remise en question de la cohésion nationale, fournissant un argument de choix, soit l’écoute de la volonté populaire, au camp nationaliste. Au vu de la situation du parti nationaliste à la suite des dernières élections générales au printemps 2015 et de la montée de l’appui à la souveraineté qui a augmenté suite à ces dernières, il serait très dangereux pour le premier ministre Cameron que le camp du oui l’emporte.

La victoire du camp favorable à la sortie coûterait cher à la carrière politique de certains individus, en premier lieu David Cameron. Il s’agit en fait de celui qui risque le plus dans cette situation. Si le camp eurosceptique l’emporte et que l’Écosse se lance dans une nouvelle campagne référendaire, sa légitimité au titre de premier ministre et chef du parti serait remise en cause. Il ne pourrait continuer à gouverner puisqu’il serait considéré comme celui qui a mis en danger la cohésion du pays un peu moins de deux ans seulement après le référendum sur la souveraineté écossaise. D’autant plus que, si l’Écosse, dans un scénario hypothétique, devenait un pays, il en serait le principal instigateur puisqu’il aurait fourni au mouvement nationaliste l’élan nécessaire pour accomplir son objectif.

Par la suite, si David Cameron réussissait à garder le Royaume-Uni au sein de l’UE, de nombreux électeurs conservateurs et membres de son propre parti risqueraient de le quitter pour s’orienter vers des formations promouvant l’idée. Les électeurs et membres du parti qui seront déçus par le fait que le pays continue d’être membre de l’Union européenne vont probablement exercer une grande pression sur David Cameron pour lui faire quitter son poste, arguant le fait qu’il préfère rester soumis à Bruxelles et nuire aux intérêts du royaume.

Dans le cas inverse, si le camp favorable à la sortie l’emporte, de nombreux électeurs tourneront probablement le dos au Parti conservateur, l’opinion publique étant partagée à presque 50-50. De nombreux Britanniques ont intérêt à ce que leur pays conserve ses liens avec l’Union européenne, que ce soient des retraités anglais ayant décidé de couler des jours heureux dans des pays au climat plus doux tels l’Espagne, des expatriés travaillant en Europe et bénéficiant des mêmes services que s’ils étaient dans leur pays d’origine ou des hommes d’affaires ou des entreprises profitant des avantages commerciaux qu’ils retirent de cette association.

Dans les deux situations, David Cameron se retrouve à perdre des appuis d’importantes franges de la population. S’il réussit à maintenir le Royaume-Uni dans l’Union, il risque certes de perdre le soutien de nombreux conservateurs mais, considérant la situation que l’issue inverse risque de susciter en Écosse et les millions d’individus qui profitent de ce lien avec l’Europe continentale, il pourrait quand même conserver son poste, les conservateurs déçus étant beaucoup moins nombreux que les autres. Dans cette situation, il s’agira surtout d’une bataille entre conservateurs pro-Europe et eurosceptiques, optique nettement plus favorable pour David Cameron puisque l’aile pro-Europe du Parti conservateur est plus importante que son adversaire.

Bref, le Brexit représente un véritable danger pour la classe politique, notamment pour David Cameron. Excepté les eurosceptiques et le mouvement indépendantiste écossais, aucun acteur politique de Londres ne fait de gain avec ce référendum. Au contraire, plusieurs, surtout au gouvernement, vont y perdre beaucoup, advenant la victoire du camp de la sortie de l’UE.