Minorisation médiatique et stratégies communicationnelles des groupes stigmatisés Analyse comparée des « printemps » chilien (2011) et québécois (2012)

Minorisation médiatique et stratégies communicationnelles des groupes stigmatisés Analyse comparée des « printemps » chilien (2011) et québécois (2012)

Par Ricardo Penafiel

Le statut de « minorité » ne correspond pas nécessairement à la faible proportion d’un groupe par rapport à un ensemble social plus vaste. En Afrique du Sud, par exemple, sous l’apartheid, bien que les « Noirs » représentaient 80% de la population et les « Blancs » seulement 10%, ce sont les Noirs qui étaient minorisés par une minorité dominante. On pourrait dire la même chose par rapport aux femmes qui représentent 50% de la population mais se voient marginalisées de l’espace public par divers mécanismes de minorisation patriarcale. De même, pour les pauvres ou tout autre groupe subalterne, leur sous-représentation dans l’espace public et dans les médias ne dépend pas tant de leur importance numérique que de processus de mal-représentation qui tendent à les minoriser dans les deux sens du terme : à les amoindrir en quantité autant qu’en qualité.

Un processus analogue se produit avec les forces sociales et politiques. Certains groupes ou mouvements d’idées, autant que d’action, auront tendance à être marginalisés de l’espace public et médiatique ou encore à être stigmatisés, à n’exister publiquement qu’en tant que fétiche ou lieu commun, reproduisant un préjugé et une position « inférieure ». À l’inverse, les groupes politiques dominants – possédant davantage de capital financier autant que culturel, social et politique – auront tendance à être surreprésentés et à hégémoniser l’ensemble de la scène politique jusqu’à ce qu’il n’existe pratiquement plus que leur version narrative dans l’espace public.

Les gouvernements représentatifs 1] tendent à réduire la diversité de positions politiques à quelques tendances générales représentées par des partis. Cependant, la scène politique, elle, ne se réduit pas aux partis. Elle inclut des syndicats, des organisations patronales, des mouvements sociaux, des associations civiles, etc[2]. Pourtant, la valeur ou même l’existence de chacune de ces forces n’est pas gravée dans le marbre. Bien que des lois, des conventions et des règlements encadrent le comportement de ces acteurs – comme le Code du travail, la Loi sur l’accréditation et le financement des associations étudiantes ou les droits d’association, d’expression et de manifestation – le statut de force politique ne lui sera pas nécessairement reconnu par le pouvoir ou par l’ensemble des autres acteurs de la scène.

Au Québec, le déni de reconnaissance[3], subi par les associations étudiantes lors du « Printemps érable », illustre bien la précarité et le caractère relationnel du statut d’acteur politique. D’ailleurs, la capacité du mouvement de grève à maintenir la mobilisation malgré la répression et le mépris[4], de même que sa massification subséquente, engendrant l’un des plus importants mouvements de contestation de l’histoire du Québec, montrent également que les acteurs sociaux ne font pas que subir les positions « subalternes » que l’ordre symbolique[5] tend à leur attribuer.

Les sans-part[6] peuvent parler[7], même si le pouvoir leur dénie cette capacité. Elles et ils parlent mais la police n’entend que des cris ou du bruit. C’est même au moment où les laissés-es-pour-compte surgissent par effraction dans l’espace public d’où ils et elles étaient exclus-es, en exigeant de s’y faire compter (et conter), que surgit le politique, que le social cesse de se reproduire sur ses propres bases naturalisées et que l’on peut entreprendre collectivement un débat réflexif et démocratique sur les fondements de l’être ensemble. C’est aussi à ce moment, et pour cette même raison, que le pouvoir a tendance à criminaliser l’exercice de droits fondamentaux (comme ceux d’association, d’expression et de réunion) et à nier le statut d’interlocuteur légitime à ceux et celles qui prétendent participer démocratiquement à la décision politique monopolisée par les « représentants-es ». Et le moyen le plus simple et habituel pour discréditer les tentatives de participation citoyenne c’est de la décrier comme violente.

La criminalisation communicationnelle de l’action collective

D’emblée, lorsqu’on parle de criminalisation des mouvements sociaux[8], on aurait tendance à penser à un phénomène policier, juridique ou législatif. Pourtant, il s’agit d’abord et avant tout d’un phénomène discursif ou communicationnel. Pour rester dans l’exemple du Printemps érable, on pourrait croire que la criminalisation du mouvement de protestation relève du Projet de loi 78 (devenu la loi 12) ou du règlement municipal montréalais P-6. Pourtant, pendant le « Printemps de la matraque[9] », aucune arrestation n’a été réalisée en vertu de ces lois et règlements liberticides[10], les forces de l’ordre préférant utiliser des figures pénales antérieures concernant l’attroupement illégal ou l’entrave à la circulation[11].

Ce qui permet de traiter un droit fondamental comme s’il s’agissait d’un crime, ce n’est pas tant des changements législatifs que l’interprétation de lois existant antérieurement. Qu’elle soit le fait de juges acquiesçant systématiquement aux demandes d’injonction d’individus questionnant le droit d’association[12] au nom d’un supposé droit de non-association[13], qu’elle relève du jugement d’un chef de police décidant de procéder à des arrestations de masse[14] ou de décideurs et décideuses politiques refusant de négocier avec des associations étudiantes qui « encouragent la violence[15] », dans tous les cas, il s’agit moins d’une question juridique que d’une question d’interprétation du droit relevant de conditions de possibilité[16] se jouant, en grande partie, dans l’espace médiatique.

Si loin, si proches
Une analyse comparée des Printemps chilien et québécois

Si l’espace public se construit en interaction avec l’espace médiatique, les relations entre la scène politique concrète et la scène politique représentée dans les médias ne sont pas directes ou inéquivoques. Comme on vient de le voir, bien que certains groupes et intérêts sont surreprésentés et d’autres sous-représentés ou mal-représentés, il est toujours possible pour un groupe politique « minorisé » médiatiquement de développer des stratégies alternatives pour apparaître dans l’espace public et même devenir le centre de l’échiquier politique, ne serait-ce qu’un certain temps.

C’est ce qui s’est produit, avec un étonnant parallélisme, au Chili entre juin et décembre 2011 et au Québec entre février et juillet 2012. Devant l’intransigeance de gouvernements ne reconnaissant pas la représentativité des associations étudiantes ni la légitimité de la grève ou de la rue comme mode de participation citoyenne, deux conflits étudiants ont débordé de leur cadre strictement éducationnel pour se transformer en d’immenses mouvements contestataires transgressifs[17] questionnant « radicalement » (à la racine) l’organisation sociale et politique.

Malgré leur commune capacité à mobiliser et à mettre en échec les tentatives de minorisation, ces deux mouvements n’ont pas connu exactement les mêmes succès. Par exemple, alors qu’au Québec l’appui au mouvement étudiant n’a jamais dépassé les 50% dans les sondages, au Chili cet appui est passé de 37% avant le conflit à plus de 80% à la fin. Étant donné leurs nombreuses similitudes et leurs différences spécifiques, l’analyse comparée des conflits étudiants au Chili en 2011 et au Québec en 2012 permet, entre autres, d’évaluer l’efficacité relative des différentes stratégies communicationnelles déployées par ces mouvements afin de subvertir cette minorisation symbolique.

Démocratie, participation citoyenne et violence politique

Bien que légalement reconnues et historiquement confirmées par tous les gouvernements qui ont négocié avec elles la fin de grèves qu’elles ont menées, les associations étudiantes du Chili et du Québec connaissent depuis quelques années des processus de criminalisation[18] se traduisant, entre autres, par un déni du statut d’interlocuteur politique, de la répression et des arrestations de masse, au nom de la supposée violence et de l’illégalité des grèves ou des manifestations.

Les valeurs de violence, de délinquance ou d’illégalité attribuées à certaines actions ou associations ne dépendent pourtant pas de « faits » univoques ou de lois clairement établies. Par exemple, alors qu’au début du 21e siècle toute manifestation était considérée comme une atteinte à l’ordre public et réprimée en conséquence de manière extrêmement violente, et souvent sanglante, autour des années 1960[19] se développe une tolérance aux manifestations permettant une croissante participation citoyenne aux débats publics[20]. Le même geste ou action, donc, change de valeur selon son cadre d’interprétation.

Pourtant, dans ces mêmes années 1960, comme conséquence des espaces de participation démocratique arrachés par les mouvements sociaux aux élites gouvernantes, surgit un révisionnisme théorique identifiant l’implication du peuple en politique comme la source de « la crise de la démocratie[21] ». Ce courant théorique de la « Stable Democracy » s’inspire de la « méthode démocratique » schumpeterienne[22] qui, en établissant une distinction entre la démocratie moderne et celle des « anciens », affirme que la démocratie ne peut viser la participation de quiconque à la décision publique, mais doit se limiter à une compétition entre élites politiques pour le vote populaire. La participation populaire dans cette dite démocratie « doit » se limiter au vote périodique car les masses seraient myopes et incompétentes.

Ce travestissement du gouvernement représentatif[23] en démocratie n’est malheureusement pas que le fait de quelques théoriciens du politique. Cette interprétation, produite par les intellectuels organiques des élites, s’est propagée à l’ensemble du corps social, à travers des « appareils idéologiques d’État »[24], comme les médias, faisant en sorte qu’on ne puisse pratiquement plus dissocier la démocratie de l’élection d’une élite gouvernante et qu’à l’inverse, on considère comme violente et comme un danger pour la démocratie la participation de « quiconque » au débat public.

« Ils n’ont même pas de votes dans les urnes, seulement des cris dans la rue »

L’idéologie de la Stable Democracy rend possibles des déclarations comme celle servant d’intertitre à cette partie. Cette affirmation provient de l’ancien ministre de l’Éducation du Chili, Joaquín Lavín, alors qu’il décriait le mouvement de grèves étudiantes et les immenses manifestations d’appui[25]. Cependant, cet énoncé anti-participationniste aurait très bien pu être prononcé par l’ex-ministre de l’Éducation du Québec, Lyne Beauchamp, qui affirmait devant l’Assemblée nationale, le 26 avril 2012 :

On s’est donné un système démocratique, on s’est donné une Assemblée nationale du Québec, on s’est donné des élus du peuple parce que la démocratie est une façon de régler nos différends sans violence dans notre société. C’est le principe même d’un système démocratique. Et, je le répète, il ne serait pas digne d’une Assemblée nationale et d’élus du peuple de céder à des gestes de violence, céder à de l’intimidation, céder à de la désobéissance civile qui implique de la violence.

Réduisant la démocratie à la délégation de la souveraineté populaire à un petit groupe (oligarchie) de « représentants-es », cette conception « délégative[26] » de la démocratie considère comme violent et illégal l’exercice des droits démocratiques fondamentaux[27].

Pourtant, il ne s’agit là que de positions partielles. Indépendamment de la légitimité électorale clamée par les gouvernements, cela n’implique pas d’emblée que l’opinion publique ou les institutions démocratiques vont nécessairement suivre ce révisionnisme. L’efficacité concrète de la stratégie rhétorique du gouvernement dépend aussi des réactions des autres acteurs et actrices de la scène politique, y compris des associations étudiantes qui peuvent construire des « images de soi » (éthos) mettant en échec les stigmates de violence et d’illégalité que les gouvernements cherchent à leur apposer.

Violence et images de soi
Stratégies communicationnelles alternatives de groupes minorisés

« Si lutter pour tes droits c’est de la délinquance, nous sommes tous délinquants »
« Ni terroristes ni délinquants / [Seulement des] Étudiants-es Conscients-es »

Devant la stigmatisation des grèves, occupations et manifestations étudiantes comme des actes de terrorisme ou de délinquance, on voit surgir des positions « dialogiques » tâchant de « rectifier les faits » : « Ni terroristes ni délinquants / [Seulement des] Étudiants-es Conscients-es ». Souvent faites sur le ton de l’ironie, on retourne le stigmate pour s’en revendiquer : « Si lutter pour tes droits c’est de la délinquance, nous sommes tous délinquants. » De la même manière, au Québec, l’initiative « Arrêtez-moi quelqu’un! » est parvenue à cumuler plus de 5 300 déclarations en image dénonçant le projet de loi 78 en exprimant :

« Charest désobéit à la démocratie, je désobéis à la loi 78 » ; « ceux qui ont voté la loi 78 sont des criminels » ; « Si la loi est contre le peuple, alors le peuple sera hors-la-loi » ; « Je suis libre, donc je désobéis » ; « à mépris total, refus global »[28]

Dans ces énoncés ironiques ou paradoxaux, on peut apprécier le renversement des valeurs opéré autour d’une opposition entre la loi (élus-es, parlementaires, mépris, etc.) et la légitimité (peuple, démocratie, liberté, conscience, etc.). Par contre, pour que ces ellipses argumentatives[29] fonctionnent, il est nécessaire de partager les codes de valeur plaçant la démocratie et le peuple au-dessus des lois et des élus-es. Autrement dit, ces messages permettent de consolider la croyance des convertis-es mais pas nécessairement de convaincre des personnes qui n’étaient pas déjà convaincues.

Or, la construction et la gestion de l’image de soi n’est pas un acte unilatéral mais le fruit d’une constante négociation (ou confrontation) où l’on doit s’adapter aux éthos préalables, institués ou « imposés » de manière interactive[30] par son interlocuteur ou interlocutrice. Ces principes développés en fonction d’interactions énonciatives « face à face », s’appliquent également dans le cas de l’éthos discursif ou collectif, impliquant des interactions « médiatisées » et différées. Aussi, pour pouvoir mettre en échec la stratégie rhétorique du pouvoir consistant à montrer l’action collective contestataire comme un crime, il ne suffit pas de dire « je ne suis pas délinquant mais conscient » ou de dire ironiquement « nous sommes tous des délinquants ». Il faut « montrer » que l’image de soi projetée par ses adversaires et reproduite sans grande distance critique par les médias est fausse, sans avoir à le dire.

Ironie et renversement de la stigmatisation

Cela ne signifie pas que l’ironie ne puisse pas être utilisée comme l’arme rhétorique redoutable qu’elle est. Au contraire, devant une situation kafkaïenne où tout acte posé pour se défendre pourra être utilisé comme preuve de culpabilité, l’ironie est souvent le meilleur moyen d’enrayer le mécanisme du piège.

C’est ce qu’ont fait les étudiants-es chiliens-nes en développant, spontanément[31], une série de « flashmobs[32] » (manifestations ou foules éclair) qui, sans rien compromettre de leur caractère « ludique », n’ont été que plus efficaces politiquement pour désamorcer les accusations de violence les excluant de l’espace public et médiatique.

La première convocation a été un « Thriller pour l’éducation » qui, après une convocation Facebook, rassembla près de 7 000 personnes devant La Moneda (Palais présidentiel) pour une chorégraphie du fameux clip de Michael Jackson, sans autre message que d’apparaître dans l’espace public sans se faire réprimer et accuser de violence.

Pour reprendre les termes de Felipe Villaseca, l’un des instigateurs de l’événement :

Nous cherchions une forme de mobilisation qui ne puisse pas être criminalisée. Pour la manifestation antérieure nous étions plus de 100 000 personnes et tout le monde et les médias d’information n’ont montré que les quelques échauffourées avec la police, sans mentionner l’ampleur de la manifestation pacifique. Alors, tout le monde voulait trouver une manière de manifester qui ne donne aucune chance aux médias de montrer quoi que ce soit de négatif.

Et c’est précisément ce qui s’est produit. Le lendemain, les médias de communication n’ont parlé pratiquement que de cette manifestation, insistant sur son caractère ludique et bon enfant. Même les émissions de variété ont abordé le sujet du conflit étudiant, alors que ce type d’information n’avait pratiquement pas été couvert jusqu’alors par ce type d’émissions. Par la suite ce fut un déferlement d’initiatives comme une course à relais de 1800 heures autour de La Moneda (siège du gouvernement), d’autres flashmobs portant sur des thèmes aussi loufoques que Lady Gaga, les Super héros, le Grand « iiiiii », Dragon Ball Z, besatón (marathon de baisers), die-in, à la plage, « à poil pour/par l’éducation », etc.

Ce même type d’actions a été utilisé au Québec, par exemple dans les maNufestations (manifestations nues), les die-in, les marches nocturnes, les casseroles, l’Anarchopanda ou la Bananarchie. Par contre, bien que ces nouveaux répertoires d’action collective[33] soient parvenus dans les deux cas à interagir avec les médias de masse et à récupérer une certaine part de contrôle sur l’image médiatique de soi, l’aspect ironique de la mise en scène a été beaucoup moins assumé au Québec qu’au Chili. Les flashmobs québécoises collaient davantage au conflit que les Michael Jackson, Lady Gaga ou Dragon Ball Z chiliens. Pathétiquement, les mobilisations purement ludiques sont davantage parvenues à neutraliser l’anti-éthos de la violence et à capter l’attention des médias que les mobilisations subordonnant des éléments de ludiques à un message politique. La grandeur carnavalesque des chorégraphies — comme, par exemple, celle d’une immense boule (Z ball) de près de huit mètres de diamètre qui a parcouru le centre-ville de Santiago pour « sauver l’éducation avec l’aide de toute la population » — a réussi à capter l’intérêt des médias de telle sorte que ceux-ci dédiaient davantage de temps à rendre compte de « la nouvelle action de protestation massive créative et festive que les étudiants nous offrent aujourd’hui » qu’au discours gouvernemental sur la violence[34].

La part du ludique et du négatif en politique

Cela en dit long sur le traitement de l’information ou les effets de cadrage des médias. Mais cela nous renseigne également sur les manières par lesquelles on publicise une cause et sur la part de « négativité » qu’implique la construction d’un référent politique. En effet, pour devenir le symbole ou le signifiant vide[35] d’une subjectivation politique contre-hégémonique, les étudiants-es (ou tout autre référent politique), doivent se vider de leurs sens « propres » (intérêts spécifiques) pour signifier les griefs et aspiration d’un ensemble social beaucoup plus large. Pour le dire de manière synthétique : Less is more.

Évidemment, les distinctions entre le Chili et le Québec ne se limitent aucunement au degré d’ironie de leurs flashmobs. Il faut tenir en considération d’importants éléments de contexte, comme l’importance d’un discours et de pratiques critiques antérieures et externes au mouvement étudiant, la plus ou moins grande ouverture de l’espace médiatique aux débats politiques ou la quantité et la qualité des appuis d’acteurs sociaux et politiques comme les recteurs et rectrices, les professeurs-es, les syndicats, etc.

Cependant l’analyse comparée de ces nouveaux répertoires d’action collective apporte d’étonnants apprentissages quant à l’efficacité du ludique et du carnavalesque en tant que mise en scène permettant d’apparaître dans un espace public et médiatique duquel on est exclu.

[1]                Manin, Bernard.2012. Principes du gouvernement représentatif. Paris : Flammarion.

[2]                Il est à noter que ces forces politiques instituées n’épuisent pas le spectre de positions existantes. Beaucoup d’autres positions existent sans être reconnues.

[3]                Honneth, Axel. 2000. La Lutte pour la reconnaissance. Paris : Cerf.

[4]                Honneth, Axel. 2006. La société du mépris. Vers une nouvelle Théorie critique. Paris : La Découverte.

[5]                Laclau, Ernesto et Chantal Mouffe. 1985. Hegemony and Socialist Strategy, Towards a Radical Democratic Politics. Londres : Verso.

[6]                Rancière, Jacques. 1995. La Mésentente. Politique et Philosophie. Paris : Galilée.

[7]                Cette formule fait référence à l’ouvrage de Gayatri Chakravorty Spivak. 2006. Les subalternes peuvent-elles parler ?. Paris : Éditions Amsterdam.

[8]                Voir, par exemple, Svampa Maristella. 2009. « Mouvements sociaux, matrices sociopolitiques et nouveaux contextes en Amérique latine ». Problèmes d’Amérique latine 74 : 113-136. Voir également, Seoane, José (dir.). 2003. Movimientos sociales y conflicto en América Latina. Buenos Aires : Consejo Latinoamericano de Ciencias Sociales (CLACSO).

[9]                Dupuis-Déri, Francis. 2013. « Printemps érable, ou, Printemps de la matraque? : Profilage politique et répression sélective pendant la grève étudiante de 2012 ». À qui la rue? : répression policière et mouvements sociaux. Montréal : Écosociété, 198-241.

[10]              Dénoncés par les organismes de défense des droits et invalidés par les tribunaux sur de nombreux points et à de nombreuses reprises.

[11]              Pour une analyse plus détaillée, voir Peñafiel, Ricardo. 2015. « La criminalisation de la participation citoyenne par des conceptions consensualistes de la démocratie participative », Revue québécoise de droit international, Hors-série, mars 2015, L’État de droit en Amérique latine et au Canada :247-271.

[12]              Et la formule Rand (sur l’unité de la représentation syndicale) reproduite dans la Loi sur l’accréditation et le financement des associations d’élèves ou d’étudiants.

[13]              Desjardins, Christiane. 2012. « Grève étudiante : le juge en chef s’en mêle ». La Presse, 2 mai 2012, http://www.lapresse.ca/actualites/dossiers/conflit-etudiant/201205/02/01-4521224-greve-etudiante-le-juge-en-chef-sen-mele.php

[14]              À ce sujet, voir notamment, le Rapport de la Commission spéciale d’examen des événements du printemps 2012, http://www.securitepublique.gouv.qc.ca/fileadmin/Documents/police/publications/rapport_CSEEP2012/rapport_CSEP2012.pdf

[15]              Gervais, Lisa-Marie. 2012. « Droits de scolarité: Québec refuse l’offre de discussion des étudiants ». Le Devoir, 26 avril 2012 http://www.ledevoir.com/politique/quebec/348516/exclusion-de-la-classe-charest-affirme-qu-il-a-pris-ses-responsabilites

[16]              Michel Foucault. 1969. L’archéologie du savoir. Paris : Gallimard.

[17]              McAdam, Doug, Sidney Tarrow et Charles Tilly. 2001. Dynamics of contention. Cambridge : Cambridge University Press.

[18]              Comme la plupart des mouvements sociaux d’envergure un peu partout sur le globe.

[19]              Suite notamment aux escalades de violence suivant la répression démesurée, rendant celle-ci contre-productive 

[20]              Fillieule, Olivier et Danielle Tartakowsky. 2014. La manifestation. Paris : Presses de Sciences Po.

[21]              Crozier, Michel, Samuel Huntington et Joji Watanuki. 1975. The Crisis of Democracy : Report on the Governability of Democracies to the Trilateral Commission. New York : New York University Press.

[22]              Joseph A. Schumpeter. 1990 [1942]. Capitalisme, socialisme et démocratie. Paris : Payot, 1990.

[23]              Qui, comme le montre Bernard Manin (op. cit.), n’est qu’une aristocratie élective.

[24]              Althusser, Louis. 1976. « Idéologie et appareils idéologiques d’État ». Positions (1964-1975). Paris : Les Éditions sociales, 67-125.

[25]              Symptomatiquement, le ministre Lavín a perdu son poste du fait de son incapacité à gérer le conflit étudiant…

[26]              O’Donnell, Guillermo. 1994. « Delegative Democracy ». Journal of Democracy 5 (1) : 55-69.

[27]              Pour reprendre les termes de la Commission interaméricaine des droits de l’homme (CIDH) : « Les grèves, les barrages routiers, l’occupation d’espaces publics, et même les tumultes qui peuvent advenir au cours de protestations sociales, peuvent occasionner des inconvénients et même des dommages qu’il est nécessaire de prévenir et de réparer. Néanmoins, les limitations disproportionnées à la protestation, en particulier lors qu’il s’agit de groupes qui n’ont d’autres moyens pour s’exprimer publiquement, compromettent sérieusement le droit à la liberté d’expression » (CIDH, 2009 : 209 ; notre traduction).

[28]              Les images ne sont plus accessibles sur le web mais on peut s’adresser aux organisateurs de la campagne : http://molotov.ca/realisations/arretez-moi-quelquun . Pour une analyse plus détaillée, voir Peñafiel, Ricardo. 2015. « Le sens des casseroles. Charivaris, cacerolazos et création d’espaces publics transgressifs dans et par le bruit ». Cahiers des imaginaires 11 : 9-28. Voir également, Peñafiel. « La criminalisation de la participation citoyenne…, op. cit.

[29]              Au sujet de la valeur argumentative des ellipses, de l’ironie ou des « lieux communs » (topoï), voir Anscombre, Jean-Claude et Oswald Ducrot. 1983. L’Argumentation dans la langue. Liège-Bruxelles : Mardaga. Voir également, Anscombre, J.-C. (éd.). 1995. Théorie des topoï. Paris : Kimé ; ainsi que 1995. « La théorie des topoï : Sémantique ou rhétorique ? ». Hermès 15 : 185-198.

[30]              Pour une articulation théorique entre la perspective rhétorique de l’éthos, la perspective goffmanienne de l’interactionnisme et la perspective discursive de la construction sociale du sens et des institutions, voir Amossy, Ruth. 2010. La présentation de soi : Ethos et identité verbale. Paris : Presses Universitaires de France.

[31]              Fuster Farfán, Xenia. 2011. « ¡A la calle estudiantes! Flashmob thriller frente al Palacio La Moneda, Santiago de Chile ». Cultura_Urbana, 9 août 2011, http://cultura-urbana.cl/%C2%A1a-la-calle-estudiantes-flashmob-thriller-frente-al-palacio-la-moneda-santiago-de-chile/

[32]              Nicholson, Judith. 2005. « Flash! mobs in the age of mobile connectivity ». Fibreculture Journal 6 (Mobility, New Social Intensities and the Coordinates of Digital Networks), http://citeseerx.ist.psu.edu/viewdoc/download?doi=10.1.1.566.6906&rep=re…

[33]              Articulant des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) à des formes « ludiques » d’expression publique ainsi qu’à d’autres formes d’action relativement instituées (grève, manifestations, etc.) 

[34]              Voir, par exemple, cette couverture de la flashmob Dragon Z ball : https://www.youtube.com/watch?v=pJEoZUk3NWs

[35]              Laclau, Ernesto. 2000. « De l’importance des signifiants vides en politique ». La guerre des identités, grammaire de l’émancipation. Paris : La Découverte/MAUSS, 93-107.

crédit photo : flickr/Diego Correa

Décentralisation et autonomie régionale dans la grève des stages

Décentralisation et autonomie régionale dans la grève des stages

Une collaboration spéciale de Eloi Halloran et Etienne Simard, militant pour la campagne sur le travail étudiant (CUTE)

La grève des stages a pris fin il y a bientôt un an, le 12 avril 2019, lorsque les étudiantes en éducation de l’UQO à Saint-Jérôme ont voté à majorité contre sa reconduction. Elle aura duré quatre semaines dans ce campus satellite des Laurentides, deux à trois semaines de plus que dans la plupart des universités et cégeps, même parmi les bastions les plus militants comme l’UQAM et le Cégep du Vieux Montréal. Des semaines de débrayage en autonomie locale et régionale, sans légitimation par une association étudiante départementale ou modulaire – il n’y en avait pas – ni soumission à un momentum dit « national » – il n’y en avait plus! Une lecture de l’histoire du mouvement pourrait y voir un fait anodin ou un retournement insolite. Pourtant, si on lâche Montréal « deux minutes » pour parler d’« une ville bien ordinaire » comme Saint-Jérôme, à l’instar de Ducharme et Charlebois, on peut y voir l’expression de la décentralisation et de l’autonomie régionale dans l’organisation de cette lutte. Un bilan.

Un mouvement sans dessus dessous

La campagne pour la rémunération des stages a été marquée par une décentralisation sans précédent dans le mouvement étudiant. Elle a mis de l’avant l’autonomie des réseaux militants dans chaque région où l’on s’organisait pour se mobiliser. Cette autonomie a été incarnée par des comités autonomes locaux où se sont concentrés les pouvoirs de décision et des structures régionales où les pouvoirs de coordination se sont négociés. Ce faisant, il s’agit d’une tentative de renversement du rapport de domination traditionnel du centre métropolitain sur les villes périphériques en supprimant toute forme de palier décisionnel à l’échelle nationale.

Plusieurs parmi celles et ceux à avoir posé les jalons de cette campagne avaient déjà participé activement à des luttes étudiantes1 à Gatineau et Sherbrooke ou s’y impliquaient toujours. Ceux et celles-ci questionnent sévèrement la centralisation des pouvoirs entre les mains d’une clique montréalaise. D’autres avaient le souci d’inscrire le mouvement dans une critique du nationalisme et du colonialisme, telle qu’elle se développe au sein de la gauche étudiante et féministe depuis plusieurs années. Il faut aussi dire que la campagne est née dans un contexte où un débat sur la centralisation et le « montréalocentrisme »faisait rage à l’Association pour une solidarité syndicale étudiante (ASSÉ)2. S’y opposaient deux tendances : l’une qui voulait s’attaquer aux disparités régionales en concentrant davantage de ressources au palier national pour mieux les répartir entre les associations de campus des autres régions3 ; et l’autre, qui proposait, au contraire, de réduire au maximum le palier national et de renforcer les conseils régionaux pour assurer une plus grande autonomie vis-à-vis de la métropole et de l’exécutif national4.

Suite à la mise en place de comités autonomes (CUTE et CRIS)5, dont le potentiel de mobilisation sur les campus semblait avoir plafonné après une première année de campagne, des structures ont été imaginées dans une perspective d’élargissement et de coordination entre les campus. L’objectif était notamment d’intégrer au mouvement des exécutifs d’associations étudiantes et de syndicats, des comités de mobilisation, des comités féministes, des comités de parents étudiants et des groupes politiques et communautaires. Sont ainsi nées, l’une après l’autre, les coalitions régionales de Montréal, de Sherbrooke, de l’Outaouais, de Québec et des Laurentides. Si la structure différait quelque peu d’une région à l’autre, le principe était essentiellement le même : des militant·e·s de différents campus collégiaux et universitaires impliqué·e·s dans des comités et des associations étudiantes s’y rencontraient pour coordonner l’organisation de la grève des stages dans leur région. L’objectif était de favoriser la prise en charge de toutes les dimensions de l’organisation de la campagne par l’ensemble des militant·e·s, peu importe le contexte régional.

Mais l’élément le plus marquant de ces structures est qu’elles n’étaient dotées d’aucun palier national : une tentative de défier le réflexe nationaliste dans l’organisation des mouvements sociaux. D’une part, on faisait l’expérience d’une organisation qui ne prenait pas la nation québécoise comme communauté politique de référence, préférant structurer le mouvement des stagiaires sur les liens de communauté entretenus entre militant·e·s d’une même région. Ce pari s’est doublé de tentatives de faire déborder le mouvement à l’extérieur des frontières québécoises, que ce soit à New York, au Michigan, en Ontario et au Nouveau-Brunswick, où des militant·e·s de l’Université de Moncton ont notamment organisé une manifestation dans le cadre du Global Interns Day, en novembre 2017. Cette critique effective du nationalisme semblait nécessaire pour inscrire le mouvement dans une perspective révolutionnaire, de manière à incarner le « refus politique de se faire peuple »6. D’autre part, la multiplication des pôles de coordination au sein de ces différentes structures rendait à peu près impossible la prise de contrôle sur l’ensemble du mouvement par quiconque s’y aventurait. Cela rendait beaucoup plus difficile la centralisation des pouvoirs à Montréal et, surtout, la mise des autres régions à la remorque du centre métropolitain. Parce que ce qu’il y a d’encombrant avec le national, c’est que c’est toujours le national de Montréal.

Saint-Jérôme ne s’est pas faite en un jour

Bien sûr, on ne renverse pas des rapports de domination simplement en inventant de nouvelles structures. Le maintien des disparités régionales au niveau des ressources et des effectifs militants repose sur des leviers qui ne sont pas entre les mains du mouvement : l’ensemble du territoire est organisé de manière à ce que Montréal demeure la métropole7. Cela a notamment des répercussions migratoires sur les militant·e·s parmi les plus motivé·e·s, qui passent d’un cégep ou d’une université de région à une université montréalaise en cours de campagne, comme ça a été le cas de quelques-un·e·s qui avaient mis sur pied les coalitions outaouaise et sherbrookoise. 

La métropole concentre également la plupart des réseaux militants, ce qui donnent un accès direct à des informations privilégiées, trop peu souvent documentées, particulièrement en ce qui concerne les conflits entre les tendances politiques et la mémoire militante. On y accède dans les bars, lors des nombreux ateliers et conférences, ou encore par l’entremise de documentation, bien que rare, disponible dans les espaces radicaux et associatifs ainsi que dans les bureaux d’associations étudiantes « nationales ». Ces différents éléments rendent beaucoup plus aisées la formulation de propositions et la consolidation théorique pour les militant·e·s de Montréal, d’autant plus que ces initiatives sont stimulées par une dialectique avec d’autres mouvements politiques, ce qui crée un désir de critique, d’opposition, de complémentarité ou de dépassement. Il va donc sans dire que les militant·e·s de la métropole ont eu une grande responsabilité dans cette tentative pratique d’inverser le « montréalocentrisme ». Pour partager au maximum l’information et les savoirs et donner de l’aide à la mobilisation, la Coalition montréalaise a mis sur pied un comité destiné à organiser des tournées de formation pour partager ses ressources dans le but d’élargir et consolider la grève sur les campus des différentes régions. Plutôt que d’organiser un camp de formation national par session, des ateliers ont ainsi été donnés à Gatineau, Sherbrooke, Victoriaville, Laval, Québec, Rimouski et Saint-Jérôme. On n’a évidemment pas anéanti la disparité entre les campus avec une tournée d’ateliers et des échanges de ressources, mais certainement plus qu’en laissant le tout entre les mains d’un palier national. Ce travail collaboratif entre les régions a eu un effet visible à travers l’articulation d’analyses originales concernant l’exploitation des stagiaires et le salaire étudiant8. On a fait le pari qu’en privilégiant une décentralisation radicale, on verrait émerger des décisions stratégiques qui n’auraient probablement jamais franchies l’instance nationale, voire qui n’aurait peut-être même pas été formulées.

D’ailleurs, quelques mois après la mise sur pieds des coalitions régionales, on a commencé à en percevoir les effets. La Coalition outaouaise émettait à l’automne 2018 un communiqué indiquant que la lutte pour la rémunération des stages ferait fi des résultats électoraux et tiendrait coûte que coûte la grève en novembre, quel que soit le gouvernement au pouvoir9. Elle appela également à une journée de grève le 20 février 2019, conjointement avec la mobilisation des organismes communautaires réclamant un meilleur financement, pour créer des ponts entre les luttes. Ce mot d’ordre a été repris à Sherbrooke et à Montréal. La Coalition de Québec a, quant à elle, lancé un appel à tenir des journées de grève flottantes dans les campus de la capitale nationale, ce qui a été tenté dans les assemblées d’associations étudiantes de l’Université Laval et du Cégep de Limoilou. La Coalition laurentienne a, pour sa part, joué un rôle clé dans le maintien de la grève au campus de l’UQO à Saint-Jérôme. Toutefois, l’exécutif de l’Association générale étudiante du Centre universitaire des Laurentides (AGECEUL) demeurait passif quant à la mobilisation et ne prenait aucune initiative quant à la convocation des assemblées générales de grève. La coalition a donc constitué un espace d’organisation où les efforts militants de l’Association des étudiantes et des étudiants du Collège Lionel-Groulx (AGEECLG), du CUTE CLG et du CUTE UQO-Saint-Jérôme ont été mis en commun, même après que la grève ait été battue en assemblée au cégep. La coalition régionale a ainsi servi à renforcer le petit noyau des militantes de l’UQO-Saint-Jérôme, qui se sentaient isolées et moins bien outillées, notamment en raison de l’absence d’une culture militante sur leur campus.

La manie des grosses manifs

Bien sûr, les relations n’ont pas été aussi harmonieuses à l’interne de toutes les coalitions ni entre ces dernières. Il y a eu à quelques reprises des désaccords entre tendances politiques au regard la stratégie de grève générale illimitée, notamment en Outaouais et à Montréal, mais généralement rien qui n’a empêché la continuité du mouvement10.

Cette expérience a poussé plusieurs militant·e·s des CUTE de Montréal à privilégier dorénavant des manifs régionales et des actions locales sur les campus, d’une part parce que l’organisation et la coordination d’une manifestation nationale était une tâche lourde pour la poignée de militant·e·s qui portaient la campagne à bout de bras, et, d’autre part, pour favoriser la participation d’un plus grand nombre de personnes aux manifestations. Un constat semblable a été formulé deux mois plus tard par les militant·e·s du CUTE du Cégep de Sherbrooke concernant le poids qu’a représenté l’organisation d’une manifestation nationale de l’ASSÉ dans leur ville11. Cette position ne faisait évidemment pas l’affaire de tout le monde. En Outaouais, par exemple, des militant·e·s du CRIS-UQO trouvaient démobilisant de se trouver un petit nombre isolé en grève à Gatineau, préférant se joindre au rassemblement devant le ministère du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité Sociale à Montréal lors de la journée internationale des stagiaires, le 10 novembre 2017.

L’année suivante, dans le cadre de la Global intern strike du 20 février 2018, on a tout de même tenté le coup des actions décentralisées sur les campus. L’idée était qu’en préparation de la grève des stages à venir, il importait de développer des savoir-faire en organisation dans les différentes régions et sur les campus où s’organisait la campagne. Le résultat a été impressionnant : des actions et piquets de grève sur plusieurs campus, dans six régions, et des militant·e·s qui prennent la rue à Gatineau, Montréal et même à Trois-Rivières. Voyant que ça grouillait un peu partout, il est probable que cette stratégie ait convaincu le gouvernement d’octroyer, dans les semaines qui ont suivi, des bourses pour le stage final en enseignement, dans le but d’atténuer la mobilisation.

Mais les tensions autour des manifs sont revenues de plus belle l’automne suivante, à la Coalition montréalaise, cette fois. Des militant·e·s proches des associations étudiantes du Cégep de Saint-Laurent, du Cégep du Vieux Montréal et de la Faculté d’éducation de l’UQAM désiraient organiser une manifestation nationale à Montréal lors de la journée du 21 novembre 2018, avançant qu’il s’agissait d’une étape nécessaire pour que le mouvement prenne de l’ampleur, notamment en étant couvert par les médias nationaux. La proposition n’a pas fait l’unanimité : des militant·e·s du CUTE UQAM ont réitéré qu’il était préférable de privilégier des actions locales pour maximiser la participation et assurer la prise en charge de l’organisation par les comités locaux, en prévision de la GGI à l’hiver suivant12. Bien qu’une décision collective en défaveur d’une manifestation nationale ait été prise, l’ADEESE-UQAM appelait à une manifestation à Montréal le 21 novembre, en gardant flou son caractère national.

La participation à la semaine de grève a été beaucoup plus considérable que prévue : environ 60 000 étudiant·e·s en grève et des milliers de personnes qui prennent la rue à Gatineau, Rimouski, Sherbrooke et Québec, en plus de la manifestation de Montréal. Tout comme à l’hiver précédent, le caractère décentralisé de la lutte des stagiaires est bien visible. Dès le vendredi précédent, les médias régionaux et nationaux couvrent amplement le mouvement, mais les tensions demeurent. À quoi sert de discuter pendant des heures en réunion si des personnes présentes font à leur tête par la suite? Que ce soit volontaire ou non, l’appel à une manif vaguement nationale a contribué à délégitimer les coalitions régionales comme espaces d’organisation.

La même tension a refait surface à deux reprises durant l’hiver, à l’aube de la grève générale, cette fois avec comme protagonistes des militant·e·s de Québec. Dans le premier cas, sans les principal·e·s concerné·e·s, il était décidé qu’une action de visibilité se tiendrait à Montréal le 15 mars au même moment où avait lieu une rencontre entre le ministre de l’Éducation et de l’Enseignement supérieur et des militant·e·s de Québec. Évidemment, sans la prise en charge de l’événement par les personnes qui l’ont décidé, l’action n’a pas eu lieu13. Dans le deuxième cas, malgré qu’aucun de ses propres effectifs n’ait été consacré à l’élargissement de la mobilisation, l’ASSÉ appelait à une manifestation nationale pour la rémunération des stages à Québec le 21 mars. L’appel est par la suite adopté par la Coalition de Québec, mais nulle part ailleurs. À Montréal et à Gatineau, on préfère organiser des manifestations à proximité pour maximiser la participation. Dans les faits, même l’ASSÉ ne mobilise personne à l’extérieur de la capitale nationale et n’envoie aucun autobus. Une manif a quand même lieu à Québec et, même si elle n’est pas spectaculaire en nombre, a le mérite d’être entièrement organisée et mobilisée par les militant·e·s de la capitale.

La tentation du national

L’expression d’une résistance nationaliste14 à l’élan de décentralisation incarnée par les coalitions régionales a également pris d’autres formes. Plus politiques, elles concernaient directement la mise en place d’une instance nationale. Si l’on prend en compte le rôle prépondérant accordé aux fédérations nationales dans l’imaginaire du mouvement étudiant québécois, il était prévisible qu’il y ait des tentatives de faire bifurquer l’organisation de la campagne vers une structure nationale. Les tentatives de récupération de la campagne par l’ASSÉ ont d’ailleurs été nombreuses, alors même que la campagne pour la reconnaissance du travail étudiant et l’appel à la grève des stages n’ont jamais été adoptés en congrès. Du côté de la Fédération étudiante collégiale du Québec (FECQ) et de l’Union étudiante du Québec (UEQ), la récupération a pris la forme d’une campagne « nationale » tardive de lobbyisme pour l’amélioration de la condition des stagiaires, qui s’écartait de toutes les dimensions progressistes et subversives de la campagne portée par les coalitions régionales15.

Or, cette contre-attaque nationaliste ne s’est pas limitée aux bureaucraties étudiantes nationales : elle a également été défendue dans les espaces d’organisation par des militant·e·s près de l’ASSÉ et des conseils exécutifs d’associations étudiantes. C’est bien sûr à Montréal, mais aussi à Québec, que les critiques contre l’absence d’un palier national ont été les plus fortes. Elles ont été formulées bien après l’instauration du mode d’organisation décentralisé, au moment où un ultimatum au gouvernement était lancé. À l’approche du point culminant de la campagne, la grève générale, on vantait les avantages stratégiques de la coordination et des actions à l’échelle nationale : meilleure représentation médiatique et politique, élargissement dans un maximum de régions, légitimation du mouvement par la centralisation des ressources, de l’information et du pouvoir dans une structure de coordination nationale, etc. On se référait ainsi aux coalitions nationales passées, organisées par l’ANEEQ, le MDE et l’ASSÉ16.

C’est la position que le conseil exécutif de l’Association facultaire étudiante des sciences humaines de l’UQAM (AFESH-UQAM) défendait, quelques semaines avant la grève de l’automne 2018, par la proposition d’une structure de coordination nationale afin de mener à bon terme la lutte pour la rémunération de stages. Advenant son refus, ses représentant·e·s menaçaient de déserter la Coalition montréalaise et de créer un palier national avec d’autres associations étudiantes, hors des espaces d’organisation existants17. Peu de temps auparavant, une proposition portée par les exécutifs de l’AFESH-UQAM et de l’Association facultaire étudiante de science politique et droit (AFESPED) de l’UQAM avait été adoptée par la Coalition montréalaise. Cette résolution prévoyait la tenue d’une conférence de presse pour annoncer le lancement de l’ultimatum de grève au gouvernement, le 1er novembre. Les exécutifs de ces associations avaient interprété le mandat en considérant qu’il s’agissait d’une conférence nationale et centralisée, ce qui a généré quelques protestations parmi lesmilitant·e·s en Outaouais et à Québec à l’effet que la Coalition montréalaise voulait leur imposer un rythme qui ne convenait pas au niveau de mobilisation dans leurs régions, et ne reconnaissaient pas être lié·e·s par une décision prise à Montréal. Un réflexe nationaliste sans malice, mais très parlant sur la réalité structurelle du « montréalocentrisme » dans le mouvement étudiant.

En réponse à cette situation, le besoin de créer un canal de communication interrégional a été exprimé à la Coalition outaouaise. Une proposition adoptée à la Coalition montréalaise et à la Coalition sherbrookoise a été d’organiser des rencontres régulières entre des délégué·e·s de chacune des coalitions régionales et d’autres groupes qui ne sont pas organisés en coalition. Nommées l’Interrégionale, ces réunions devaient se tenir par vidéoconférence environ aux trois semaines pour échanger de l’information et du matériel produit pour la campagne, mais pas à des fins décisionnelles. Les coalitions régionales étaient aussi invitées à rendre disponibles aux autres leurs procès-verbaux et comptes-rendus18.

Parallèlement, une discussion issue d’une journée de formation en août 2018 a mené à la création d’un comité de liaison – avec délégation rotative de chaque coalition régionale – dans le but de ne pas laisser les rencontres avec le ministère de l’éducation entre les mains des fédérations étudiantes – la FECQ et l’UEQ, principalement. Le mandat de ce Comité de liaison se limitait à recueillir de l’information et de la ramener dans les coalitions régionales. Dès le départ, la condition de la tenue des rencontres était la présence des délégations de toutes les régions afin qu’aucune ne soit laissée derrière. Une position claire contre les négociations avec le gouvernement était aussi prise. On considérait que ce dernier ferait des concessions à la hauteur de ce que la pression le contraindrait de faire et, qu’en ce sens, des négociations ne joueraient pas à notre avantage. Au contraire même, elles tendraient davantage à atténuer l’effet des revendications, ce qui a été confirmé par les gains de la grève : des bourses se rapprochant des revendications des fédérations étudiantes.

Il est intéressant de comparer la dynamique de l’Interrégionale et du Comité de liaison. Alors que le premier est issu d’un débat enflammé et souvent lourd sur la structure, il n’a pas particulièrement été investi par la suite. Les réunions Skype étaient difficiles à tenir et les personnes qui réclamaient un palier national n’y ont jamais participé. Le Comité de liaison a, quant à lui, été beaucoup plus investi, particulièrement par les exécutifs d’associations étudiantes locales impliqués dans les coalitions régionales. C’est le caractère prestigieux de la représentation auprès du ministère qui semblait attirant, et pas seulement pour les personnes qui y étaient déléguées. Il est arrivé à quelques reprises que la discussion en préparation d’une rencontre avec le ministère puisse occuper presque tout le temps disponible pour des rencontres de coalition, et ce, dans toutes les régions organisées. Alors que tout le temps et les énergies étaient nécessaires pour que la grève passe et tienne, la tentation de « représenter » le mouvement et d’en prendre la direction était manifeste dans les espaces d’organisation.

Ces exemples un peu, comme celui de la manifestation nationale conjointement organisée avec l’ASSÉ à Québec, exposent plutôt bien la difficulté de briser les dynamiques de représentation et le réflexe nationaliste dans l’organisation des mouvements sociaux, et ce, même si l’on met en place des structures qui cherchent à les contrer. Cette difficulté prend une ampleur particulière dans la « Belle province » où l’indépendantisme a été pendant longtemps fédérateur dans les mouvements sociaux. Dans la métropole et la capitale nationale surtout, mais aussi, à un moindre degré, dans les autres coalitions régionales, une tendance en faveur de la centralisation nationale est régulièrement revenue à la charge. Elle se manifestait par une volonté d’utiliser les effectifs plus importants de Montréal et de leur donner un caractère national, que ce soit pour la représentation médiatique, les rencontres avec le gouvernement ou l’organisation de manifestations, le tout pour donner une impression d’un mouvement massif. Au niveau décisionnel, elle s’exprimait par une volonté de représenter une région au moment de la délibération et de renvoyer la charge de l’exécution à d’autres.

Or, c’est exactement cette dynamique de représentation que tentait de briser l’organisation de coalitions autonomes et décentralisées, en misant sur la vivacité d’une base active et capable partout où la campagne s’organisait plutôt que sur une représentation de la masse qui se fait craindre par la force du nombre. Même au sein de tendances se réclamant de l’anticapitalisme, de l’autonomie et de l’anticolonialisme, l’imaginaire radical présente un penchant pour la masse « nationale » quand vient le temps de se structurer, que ce soit dans le but de lancer des mots d’ordre à l’ensemble du mouvement ou simplement pour laisser à d’autres la prise en charge des aspects les laborieux et le plus plates de l’organisation.

Le chauvinisme régional : effet pervers de la décentralisation

La mise en place d’un mouvement structuré en coalitions régionales a évidemment entraîné son lot de conséquences indésirables, la plus pernicieuse étant le chauvinisme régional. À peu près tous les campus ont eu besoin d’aide à un moment ou un autre pour l’organisation de la lutte, que ce soit pour des ateliers de formation, l’organisation d’instances, la rédaction de communiqués ou la distribution de matériel de mobilisation. Et bien sûr elle provenait presque essentiellement de l’UQAM, mais aussi de l’UdeM et du Cégep Saint-Laurent.

Or, cette aide ne venait jamais sans une influence sur l’analyse ou la stratégie à adopter, en plus d’une certaine arrogance. Après l’atteinte d’un certain degré d’organisation, à peu près toutes les coalitions régionales ont opéré un repli pour conserver leur autonomie vis-à-vis Montréal. Ce repli était principalement porté par des exécutifs d’associations étudiantes, dont les responsabilités de représentation contraignaient davantage la possibilité de défendre des lignes plus maximalistes dans les revendications comme dans la tactique. Si ce réflexe est tout à fait justifié, voire nécessaire à l’autonomie, ce détournement vis-à-vis des militant·e·s de la métropole est arrivé à un moment où les besoins d’organisations étaient les plus criants, particulièrement entre la grève de l’automne et celle de l’hiver.

C’est devenu du chauvinisme au moment où les canaux de communication entre régions ont été de plus en plus interrompus pour se détourner de l’objectif de la grève générale illimitée des cours et des stages à l’hiver 2019. Cet abandon s’est exprimé de différentes manières, soit en poussant soudainement une ligne maximaliste (GGI ou rien!) en sachant pertinemment que ça ne passerait pas dans les AG sans aide extérieure pour la mobilisation, soit en évitant tout bonnement la tenue d’AG de grève, cette fois sous prétexte que la mobilisation n’était pas au rendez-vous. C’est d’ailleurs cette dynamique ainsi que la multiplication des rencontres des différentes instances d’organisation, c’est-à-dire les assemblées générales, les conseils de grève ou des stagiaires, les comités autonomes, les coalitions régionales, le comité de liaison, l’Interrégionale, qui ont rendu de plus en plus difficile la mobilisation, malgré son importance évidente.

Dans le même sens, le chauvinisme régional a également servi à mystifier certains conflits de tendances. À gauche comme à droite, il a servi à défendre une ligne centralisatrice et nationaliste dans les régions non-métropolitaines contre la décentralisation et l’autonomie défendues par « Montréal », pourtant « montréalocentriste ». À droite, il a servi à combattre la stratégie de GGI au profit de journées ponctuelles ou bien pire, d’une campagne de lobbying. À gauche, il a servi à mousser la prétention et la suffisance montréalaises à concrétiser la ligne juste d’une grève des stages authentique, sans pour autant s’intéresser à donner un coup de main à l’extérieur de l’Île. Dans tous les cas, le chauvinisme régional a été néfaste pour la mobilisation et a nui au maintien et à l’élargissement du mouvement.

« Ça me fait bien de la peine, personne n’écrit sur Saint-Jérôme »

Peut-on avancer que la grève a eu lieu à Saint-Jérôme en raison des structures décentralisées? Non. Dans les faits, le mouvement a gagné le centre d’études universitaires des Laurentides (UQO) bien avant la mise sur pied des coalitions régionales, dès le tout premier appel à la grève des stages la journée du 16 février 2017 où se déroulait une manifestation à Québec. À l’appel des différents comités autonomes de Montréal, Gatineau et Sherbrooke, et particulièrement du CRIS-UQO, les étudiantes en éducation de Saint-Jérôme se sont mises en grève, conjointement avec celles de l’Association étudiante modulaire en éducation de l’UQO (Gatineau). Une initiative similaire lancée par une fédération nationale aurait très bien pu trouver le même écho à Saint-Jérôme : la résonance de la revendication pour la rémunération des stages concerne une réalité de classe propre à ce campus, qui concentre les étudiant·e·s universitaires parmi les plus précaires. « Parce que l’ouvrage est rare à Saint-Jérôme, faut qu’y travaillent! ».

On peut par contre affirmer sans gêne que c’est en raison des structures décentralisées que la grève y a duré aussi longtemps. Aucune instance à l’extérieur des Laurentides n’avait la légitimité d’appeler à la fin de la grève, même quand les dernières associations étudiantes de l’UQAM y mettaient fin. En même temps, la Coalition laurentienne est celle qui a été le moins affectée par le chauvinisme régional. Les militant·e·s y ont entretenu des canaux de communication avec les autres coalitions tout au long de la dernière année de campagne, particulièrement avec celles de Québec, Montréal et Gatineau. De l’aide pour la rédaction, la mobilisation et l’organisation d’instances a été demandée au besoin et l’autonomie a tout de même été conservée.

Bref, malgré un bilan mitigé pour la décentralisation régionale, on doit en partie la concession du gouvernement à mettre en place des bourses pour stagiaires dans de nombreux programmes à l’université, au cégep et dans les écoles de métiers à la ténacité des grévistes en enseignement de Saint-Jérôme. La contribution du CUTE UQO-Saint-Jérôme et l’indépendance des grévistes vis-à-vis de leur association étudiante incarnent particulièrement bien le potentiel de l’autonomie dans l’organisation d’une lutte au sein de laquelle on préfère un mouvement plus petit mais plus dynamique à un mouvement plus spectaculaire en nombre mais centralisé. On parle quand même de la première grève offensive à obtenir des gains importants en quarante ans.

Les militant·e·s de la Coalition laurentienne pour la rémunération des stages ont d’ailleurs pris la décision de transformer cette dernière en coordination régionale de la grève pour le climat, un héritage structurel concret de la grève des stages, mais la poursuite de ce mouvement est nébuleuse. Un an plus tard, on ne sait toujours pas si la décentralisation régionale marquera durablement la structure du mouvement étudiant. On sait cependant que le comité de transition post ASSÉ en charge de réorganiser la gauche étudiante a été fortement investi par les militant·e·s qui ont le plus ardemment défendu la nécessité d’un palier national au cours de cette campagne. Ainsi, s’il est impératif de souligner les limites de la décentralisation « antinationale », les critiques se limitent encore, depuis la fin de la grève des stages, à marteler la nécessité d’une fédération nationale, et ce, dans les mêmes termes et par les mêmes tendances qu’il y a quatre ans, comme si rien n’avait bougé depuis. Pourtant, des comités autonomes ont bel et bien organisé de A à Z une grève dans différentes régions, alors que les structures nationales que sont l’AVEQ19 et l’ASSÉ ont toutes deux été dissoutes vers la fin de la campagne, et ce n’est pas faute de tentatives de les (ré) animer. N’est-ce pas là un point de départ logique pour la suite des réflexions organisationnelles?

Enfin, il reste peu probable que les mouvements à venir transcendent les frontières provinciales et canadiennes, si on se fie au peu de motivation à intégrer Ottawa dans la Coalition outaouaise ou au désintérêt généralisé vis-à-vis de la collaboration avec les groupes du Nouveau-Brunswick et des États-Unis au cours de cette campagne. De même, la volonté de certaines tendances de mettre sur pied une structure qui prendrait encore une fois la nation comme communauté politique de référence est de mauvais augure. Il n’y a pas à dire, le nationalisme se porte plutôt bien au sein de la gauche étudiante, même là où il s’ignore le plus. « Lâchez-moé ça, vos steps assis et chantez-moi donc Saint-Jérôme! »

1 Plus précisément, les grèves de 2005 contre la réforme de l’AFE et les coupures dans les bourses, et celles de 2007 et de 2012 contre des hausses de frais de scolarité.

2 On retrouve plusieurs textes de réflexions à ce propos dans le cahier de congrès de l’ASSÉ de février 2016, accessible à tinyurl.com/y4v4wy98.

3 Comité anti-montréalocentriste (CRAMo), « L’ASSÉ en dehors de l’île », Congrès d’orientation de l’ASSÉ, 14 novembre 2016. tinyurl.com/yy3dvltn.

4 Thierry Beauvais-Gentile et Chanel Fortin, « Juste milieu », Dissident.es, 27 octobre 2015. dissident.es/juste-milieu/.

5 Désignent les comités unitaires sur le travail étudiant (CUTE) à Montréal, Sherbrooke et Saint-Jérôme et les comités pour la rémunération des internats et des stages (CRIS) à Gatineau.

6 « […] quand la classe ouvrière exprime son refus politique de se faire peuple, la voie la plus directe de la révolution socialiste ne se ferme pas, elle s’ouvre » ; Traduction de Yann Moulier avec la collaboration de G. Bezza, Mario Tronti, Operai e capitale, Turin : Einaudi, 1966. tinyurl.com/y3oapmkh.

7 Jadd-Abigaël Céré et Étienne Simard, « Appel interurbain », Dissident.es, numéro 0, août 2016. dissident.es/appel-interurbain.

8 Voir, par exemple, Amélie Poirier et Camille Tremblay-Fournier, « La grève des stages est une grève des femmes », Françoise Stéréo, 23 mai 2017. francoisestereo.com/greve-stages-greve-femmes.

9 Coalition de l’Outaouais pour la rémunération des stages, « Lettre ouverte aux partis politiques et à leurs candidat.e.s », 17 septembre 2018. tinyurl.com/yxdaaqjb.

10 Le plus gros des tensions s’est exprimé autour de l’organisation de manifestations, et ce, dès la toute première journée de grève pour la rémunération des stages, tenue le 16 février 2017. L’appel à une manifestation à Québec, en marge du Rendez-vous national sur la main-d’œuvre, avait provoqué d’importantes tensions entre les militant·e·s des CUTE et celles et ceux du Front régional de l’ASSÉ à Québec (FRAQ) ; CUTE UQAM, « Rapport sur la collaboration trouble avec le Front régional de l’ASSÉ à Québec », Dissident.es, 11 avril 2017. tinyurl.com/yxvbdd6f.

11 CUTE Sherbrooke, « Mourir sans quorum », Dissident.es, 27 mars 2017. tinyurl.com/y4asrhw3.

12 Pour une analyse détaillée des rapports conflictuels entre les comités autonomes et les associations étudiantes en contexte de grève, voir le bilan de Loïc Carpentier, Félix Dumas-Lavoie, Camille Marcoux et Amélie Poirier, « Tu travailles pour qui? Une grève, trois récits », Dissident.es, numéro 6, automne 2019. dissident.es/tu-travailles-pour-qui-une-greve-trois-recits/.

13 D’autant plus que cette action devait avoir lieu le même jour où étaient déjà planifiées la grande manifestation pour le climat et la manifestation annuelle contre la brutalité policière, ce qui fait que la mobilisation et la visibilité de cette action aurait été à peu près nulle.

14 Nous comprenons le nationalisme comme une logique de reconnaissance qui a pour cadre de référence un espace national et ses frontières, même si un mouvement en rejette les institutions. Pour une définition semblable, voir Angela Mitropoulos, « Autonomy, Recognition, and Movement », sometim3s, 22 avril 2006. s0metim3s.com/2006/04/22/autonomy-recognition-movement/.

15 La campagne Stagiaires en solde a été lancée quelques semaines avant le déclenchement de la grève générale, voir www.stagiairesensolde.quebec.

16 Benoît Renaud, « Six grèves générales ». tinyurl.com/y2unzqly.

17 Comme elle a été présentée en assemblée générale, sous huis clos, la proposition est seulement accessible en retranscription dans le texte « Et pendant ce temps en région… », que des militant·e·s de l’Outaouais ont écrit pour critiquer l’initiative centraliste et nationaliste du conseil exécutif de l’AFESH ; CUTE Magazine, « Et pendant ce temps en région… », Dissident.es, 25 octobre 2018. dissident.es/et-pendant-ce-temps-en-region/.

18 Les procès-verbaux des coalitions sont disponibles sur le site grevedesstages.info/coalitions-regionales.

19 Association pour la voix étudiante au Québec.